<351> années, touchant les 30,000 hommes auxiliaires que la Russie s'engage d'entretenir en Livonie. Or, comme le gouvernement de Russie traite toutes les affaires avec un très profond secret, il est très difficile à juger jusqu'à quel point le ministre peut porter l'animosité qu'il a contre la maison de Holstein, d'autant plus qu'il y a de grands soupçons que le jeune grand-duc de Russie pourrait bien être envoyé en Sibérie, ou bien exclus de la succession.

Les nouvelles de Pologne font mention de toutes les trames des Autrichiens et des Russes à la dernière Diète de Varsovie pour entraîner cette République dans leur alliance, et la Diète extraordinaire dont le roi de Pologne vient de signer les Universaux, paraît être une pièce d'attente et un ressort que ces Puissances ne feront jouer qu'à la mort du roi de Suède, pour entraîner alors toute la Pologne dans leur parti.

Je vous fais communiquer à cet ordinaire par une autre dépêche les nouvelles que j'ai reçues de Vienne, par lesquelles vous verrez que la conduite de cette cour doit nécessairement me donner de grands soupçons par rapport à ses vastes desseins.

Ne vous imaginez pas que les finances de l'Impératrice-Reine soient si dérangées qu'elle ne puisse pas fournir de son propre fonds à la dépense d'une ou deux campagnes; c'est un pays fécond en ressources, des finances duquel je suis assez instruit pour vous assurer que je n'avance rien sans fondement.

Quant à l'Angleterre, on dit tout haut à Londres que le roi d'Angleterre est résolu d'envoyer une escadre dans la Baltique; on dit à Vienne qu'il veut envoyer le duc de Cumberland à Hanovre, et toutes ces nouvelles, prises ensemble, nous font conjecturer que ces puissances ont un dessein arrêté sur la Suède. Il est bien difficile de pouvoir deviner si des arrangements aussi considérables ne sont relatifs qu'au maintien de la forme du gouvernement présent de la Suède; il me semble qu'il n'en faudrait pas tant pour un si petit objet, et je soupçonnerais plutôt de la mauvaise foi dans les procédés que ces puissances ont les unes envers les autres.

La grande amitié que le roi d'Angleterre a pour le duc de Cumberland, jointe à l'affaire de Blackwell, à l'escadre anglaise qui doit aller dans la Baltique, à la prolongation du traité de subsides avec les Russes touchant les 30,000 hommes auxiliaires, — toutes ces choses-là me font soupçonner que le roi d'Angleterre a quelque dessein pour son fils et qu'il est intentionné de le placer sur le trône de Suède après le décès du Roi. Je soupçonne que le Danemark est d'intelligence avec l'Angleterre et que cette puissance-là lui a promis soit le duché de Holstein ou quelqu'autre démembrement des provinces de Suède.

Vous comprenez facilement que l'Angleterre peut prendre tous ces arrangements-là sans grandes dépenses et que, s'agissant de la fortune d'un fils bien aimé du roi d'Angleterre, il est à croire qu'il ne ménagera pas son trésor qu'il a à Hanovre, pour lui procurer cet établissement.