2966. AU MINISTRE D'ÉTAT COMTE DE FINCKENSTEIN A SAINT-PÉTERSBOURG.

Potsdam, 5 mars 1748.

J'approuve fort la manière dont vous vous êtes conduit, selon votre dépêche du 17 de février dernier, dans la conversation que vous avez eue avec le Chancelier touchant l'affaire du capitaine Stackelberg,49-2 et votre façon de penser à cet égard a été entièrement conforme à ce<50> que j'en aurais pu désirer, pour la direction que vous avez tenue en conséquence à ma grande satisfaction. Si le Chancelier venait à vous reparler sur ce sujet, vous pourriez bien alors lui dire avec une sorte de fermeté que, par la vivacité que vous me connaissiez, vous ne pouviez pas savoir sur quel pied je prendrais cette affaire, et que, comme pour votre personnel vous ne désirez rien avec plus d'empressement et ne discontinueriez de travailler de toutes vos forces pour fomenter une bonne harmonie et intelligence entre les deux cours, vous ne souhaitiez rien tant, à cause de cela même, si ce n'est que la cour de Russie prit tel parti dans l'affaire en question qui fût de nature à n'y point mettre empêchement, en m'aigrissant tout-à-fait. Vous ne devez cependant pas dire ceci au Chancelier ministérialement, mais par manière de discours de vous à lui, uniquement pour observer l'effet qu'il fera sur lui, s'il en paraîtra effarouché, ou bien s'il servira à le radoucir.

Au reste, je ne me persuade pas aussi facilement que les antagonistes du Chancelier paraissent s'en flatter de réussir contre lui, en cas que les troupes russiennes puissent recevoir quelque échec aux Pays-Bas; car, une fois, il s'est trop ancré dans l'esprit de sa souveraine pour avoir à craindre quelque chose de leur part : et le moyen, après cela, de détromper une princesse qui de son gré veut bien s'aveugler ellemême et qui d'ailleurs ne se mêle d'aucunes affaires? Il est donc sûr et certain que le temps présent ne promet rien encore pour en pouvoir conclure la perte prochaine du Chancelier, mais il faudra que les apparences changent entièrement avant que de pouvoir espérer sa chute. Quant à vous, continuez d'être sage et prudent comme vous l'avez été jusqu'ici, et je ne cesserai d'être fort content et satisfait de votre conduite.

Federic.

Nach dem Concept.



49-2 Vergl. S. 23.