2978. AU CONSEILLER BARON LE CHAMBRIER A PARIS.

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Chambrier berichtet, Paris 1. März, über eine längere Unterredung mit Puyzieulx in Betreff der Friedensaussichten. „Puyzieulx finit par me dire : la paix viendra quand elle pourra, mais lorsque cela arrivera, toutes les puissances qui auront fait la guerre, en sortiront ruinées, à la réserve de Sa Majesté Prussienne, qui y aura seule gagné; car l'Angleterre a beau faire, ses dettes augmentent tous les jours; nous savons ce qu'il nous en coûte; l'Espagne en est épuisée, aussi bien que la Hollande, le roi de Sardaigne et la reine de Hongrie, sans parler des Génois et du duc de Modène. — Vous conviendrez, s'il vous plaît, répondis-je au marquis de Puyzieulx, qu'aucune puissance n'a joué si grand jeu dans cette guerre que le Roi mon maître, et que, si malheureusement le pied lui avait glissé, il aurait été plus à plaindre que personne. — Je l'avoue, me répliqua le marquis de Puyzieulx, ce sont ses victoires, son habileté et les fautes des autres dont il a profité, qui l'ont mis dans la situation dans laquelle il se trouve.“

Potsdam,16 mars 1748.

Je n'ai pas pu lire le récit que vous m'avez fait, par le post-scriptum de votre dépêche du 1er de ce mois, du dernier entretien que vous avez eu avec le marquis de Puyzieulx, sans m'étonner de ce que des gens aussi habiles en politique que les ministres français ne savent pas assez cacher la grande envie qu'ils ont à me voir rembarqué de nouveau dans la guerre. Je ne veux point m'arrêter sur la réflexion que M. de Puyzieulx vous a faite touchant ma situation présente en comparaison de toutes les autres puissances qui sont en guerre; je la lui passerai et je la regarde comme soufflée à lui par quelque personne attachée au parti autrichien ou par quelque Saxon. La réponse que vous avez faite là-dessus à M. de Puyzieulx est bien juste. Mais qu'il lui plaise d'un autre côté de réfléchir pour un moment sur la situation actuelle de la France, et il trouvera que n'ayant rien perdu jusqu'ici de ses possessions, mais tout au contraire conquis une si belle province que les Pays-Bas autrichiens, dont elle tire des ressources très considérables, et ayant d'ailleurs son armée aux frontières de la Hollande, l'on ne saurait dire que la France soit dans une mauvaise situation ni qu'elle ait fait une guerre malheureuse. En attendant, vous avez fort bien fait de dissimuler comme si vous n'entriez point dans le vrai sens de tous les propos que M. de Puyzieulx vous a tenus à cet égard, et vous ferez fort bien de continuer de la sorte, aussi souvent qu'il vous tiendra de pareils discours, et je ne doute pas qu'il ne s'explique encore plus clairement envers vous sur ce sujet.

La négociation dont il vous a parlé en mots entrecoupés, est à Turin, et je viens d'apprendre d'autre part qu'il doit y avoir une négociation secrète entamée entre l'Espagne et les alliés par le moyen de la cour de Turin et l'infant Don Philippe. Ces conjectures sont en partie fondées sur le grand nombre de courriers que le général sardinois à Vienne, délia Rocca, reçoit et expédie, et sur les fréquentes conférences qu'il a avec le ministre anglais, Robinson, et les ministres de la cour de Vienne, sans que les militaires y assistent. Je doute cependant que cette négociation aboutisse à grande chose, et je persiste d'être du sentiment que, si la paix se doit négocier avec succès, il faudra que cela se fasse à Londres. La Saxe, encore, ne pourra pas servir à la France pour mettre en train quelque négociation de la paix, puisque l'Angleterre n'a guère de confiance à la cour de Dresde, avec qui elle est brouillée à plusieurs égards. Ce qui éloigne le plus la paix, c'est que l'Angleterre se flatte encore de pouvoir tirer de grands avantages contre la France moyennant le secours du corps de troupes russiennes ; tant que cette idée lui durera, tant elle ne pensera point sérieusement à une pacification, et comme, pour l'en faire revenir, il faudra bien qu'elle voie par les événements de la campagne prochaine que ce secours est insuffisant pour gagner la supériorité sur la France, je conclus que la paix ne se fera pas qu'après la campagne finie.

Federic.

Nach dem Concept.