3155. AU CONSEILLER BARON LE CHAMBRIER A PARIS.

Potsdam, 16 juillet 1748.

J'ai bien reçu vos dépêches du 1er et du 5 de ce mois. Sur ce qui regarde la paix, on ne la saurait regarder autrement que faite et conclue; mais comme la cour de Vienne ne discontinue point à briguer à la cour d'Hanovre une ligue à faire entre les cours principales d'Allemagne, se servant de l'expression que le temps était venu où l'Empire devrait pourvoir à la sûreté et à la dignité de son système, et qu'il faudrait augmenter l'autorité et le pouvoir de l'Empereur pour n'avoir plus rien à craindre de la France, je suis très curieux de savoir de vous comment les ministres de France envisagent de pareils propos, dont il n'est point à douter qu'ils ne soient assez informés. Vous observerez avec cela<173> que toutes les fois que vous serez obligé de sonder les ministres de France sur de pareils sujets, vous devez bien mesurer vos expressions, afin de ne pas donner le moindre lieu à ce reproche ignominieux que ces ministres m'ont déjà fait comme si je ne cherchais qu'à souffler le feu et qu'à prolonger les troubles pour pêcher en eau trouble. Au reste, la réussite du susdit dessein de la cour de Vienne dépendra beaucoup de la façon que les Anglais l'envisageront.

Comme selon votre dépêche du 5 de ce mois le marquis de Puyzieulx s'est ouvert à vous sur l'alliance où les Puissances maritimes voudraient m'attirer, vous pourrez bien lui dire, quoique seulement par manière de discours, qu'il était vrai que les Anglais et la cour de Vienne travaillaient à présent à faire garantir la Sanction Pragmatique et toutes les possessions auxquelles la cour de Vienne n'a pas renoncé par les traités; qu'on disait même que cette cour cherchait de son mieux à endormir la France, pour que celle-ci lui laissât faire.

Sur ce qui regarde le sieur Perochon qui demande à être nommé mon consul à Lisbonne, je vous dirai que, comme je ne suis point pressé d'avoir un consul à Lisbonne, il faudra que ledit Perochon s'arrange préalablement sur sa demande avec ma caisse des recrues à Berlin, et que je verrais alors. Au surplus, vous me rendrez un service essentiel, si vous pouvez sous mains engager quelques gens riches ou quelques marchands ou manufacturiers en France, attachés à la religion réformée, afin qu'ils viennent s'établir dans mes pays; vous vous y prendrez cependant d'une façon à n'être point remarqué là-dessus ni à vous exposer à quelque reproche de la part de la cour de France.

Federic.

Nach dem Concept.