3297. AU CONSEILLER PRIVÉ DE LÉGATION DE ROHD A STOCKHOLM.

Potsdam, 15 octobre 1748.

Il m'est revenu, entre autres, de Pétersbourg que la cour de Russie ne saurait effectivement se passer du Danemark, si elle avait le dessein de troubler la première Diète suédoise qui se tiendra sous le nouveau règne, et que, dans le cas même où elle serait résolue de s'en tenir aux simples démonstrations, il faudrait toujours qu'elle tâchât de porter la cour de Copenhague à en faire autant de son côté, si elle voulait que ses démonstrations produisent l'effet désiré; mais qu'en convenant de ces principes, il était à croire cependant que les Suédois n'avaient rien à craindre, s'ils se conduisaient sagement et s'ils ne donnaient pas prise contre eux par un changement trop marqué dans la forme présente du<264> gouvernement, changement qui faisait, selon toutes les apparences, l'unique objet des inquiétudes du Chancelier et des mesures qu'il prenait avec le Danemark; qu'il n'y avait rien, au reste, dans les arrangements qui se faisaient à Copenhague qui devait beaucoup alarmer la cour de Suède, si les finances danoises étaient en aussi mauvais état qu'on le disait il y a quelque temps, et que les dettes considérables qui avaient été contractées sous le dernier règne, donnaient effectivement lieu de le croire; qu'il semblait au contraire que tous ces arrangements n'étaient marqués jusqu'ici qu'au coin de la simple démonstration. Qu'on pourrait conclure de toutes ces considérations que la cour de Danemark, interéssée tout comme la Russie à contrecarrer l'établissement de la souveraineté en Suède, s'entendra avec la première, pour tâcher de prévenir un changement pareil, et qu'elle joindra volontiers ses démonstrations à celles du Chanceher pour cet effet, mais qu'elle n'ira pas plus loin et qu'elle cédera le reste de l'ouvrage à la Russie; et que d'un autre côté il ne tenait qu'à la Suède de se mettre à l'abri de tout, en renvoyant le changement prémédité jusqu'à une occasion plus favorable, qui ne tarderait vraisemblablement pas à se présenter dans peu d'années.

Mon intention est que vous fassiez le meilleur usage que possible, là où vous êtes, de la présente communication que je viens de vous faire, sans cependant que vous disiez d'où elle vous est parvenue, si ce n'est uniquement à la princesse royale de Suède, ma sœur, à laquelle vous en pourrez faire confidence, si d'ailleurs les circonstances vous le permettent.

Ce qu'au reste, selon votre dépêche du 4 de ce mois, le comte de Tessin vous a dit, est beau et bon; je souhaiterais cependant qu'il ne se fît point de propositions, à la Diète à tenir immédiatement après le décès du roi de Suède, qui pussent fournir occasion aux ennemis de la Suède d'en profiter. S'ils veulent se pourvoir en Suède de blés, ils trouveront, je pense, la meilleure occasion d'en acheter dans mon pays de Prusse.

Federic.

Nach dem Concept.