3392. AU CONSEILLER PRIVÉ DE LÉGATION DE ROHD A STOCKHOLM.

Potsdam, 24 décembre 1748.

Quoique j'aie appris avec plaisir par votre dernière dépêche, du 10 de ce mois, qu'on commençait à revenir en Suède des impressions singulières qu'on s'y était faites, et qu'on y était résolu de nouveau de faire une sage et prudente contenance, je ne saurais cependant d'un autre côté m'empêcher de vous témoigner le peu de satisfaction que j'ai rencontré à la lecture de vos précédents rapports, et principalement de ceux du 29 du mois de novembre dernier et du 3 de ce mois. L'idée de faire présenter à la cour de Danemark le mémoire en question,320-2 et la confidence qu'a faite le comte Tessin de ce mémoire au ministre de Russie, de Panin, ont été des choses fort mal digérées pour l'intérêt de la Suède, et la conduite qu'on vient d'y tenir, en donnant ainsi à connaître à chacun le défaut de la cuirasse, — ce que cependant on avait plutôt dû cacher fort soigneusement — est tellement extravagante que j'en suis quasi alarmé pour me mêler davantage de ce qui concerne les affaires de cette couronne.

Je ne suis point à même de pouvoir juger de ce qui s'est fait à l'égard du colonel Adlerstråle, n'étant point moi-même sur les lieux; il me semble toutefois qu'il n'en est pas le temps présentement de s'échauffer de procès sur de vieilles affaires, mais plutôt de tâcher de gagner et d'unir ensemble les États et les familles, de Suède. Aussi en en parlerez-vous confidemment de ma part au sieur de Rudenschöld et lui direz que, comme il était mon ami et que je le connaissais pour la meilleure tête de Suède, je n'avais pu me dispenser de lui communiquer confidemment et cordialement mes pensées que dessus, lesquelles n'avaient simplement pour objet que le véritable bien et intérêt de la Suède.<321> Vous lui ajouterez que — les affaires de Suède dépendant principalement de la conduite et de la contenance qu'on observerait en Suède, et outre cela de ce qu'après la mort du Roi on ne touchât le moins du monde, en aucune de ses parties, à la forme présente du gouvernement, mais qu'on se contentât uniquement d'affermir la succession comme elle était établie en Suède — que si l'on en agissait de la sorte en Suède, j'étais tout persuadé qu'on n'y aurait absolument rien à craindre. Je veux bien au reste vous dire pour votre direction que mon intention est que vous teniez toujours une conduite mitigée à l'égard du comte Tessin, de manière que, quand il pourrait vouloir donner dans l'audacieux, vous tâchiez alors de le retenir, en l'intimidant, mais qu'en cas que dans d'autres rencontres il fût timide, vous fissiez votre possible pour l'animer et lui inspirer du courage.

Federic.

Nach dem Concept.



320-2 Vergl. S. 311.