3490. AU CONSEILLER PRIVÉ DE LÉGATION DE ROHD A STOCKHOLM.

Potsdam, 25 février 1749.

J'ai bien reçu en son temps vos dépêches des 4, 7 et ro de ce mois. Les arrangements que selon ces dépêches le ministère de Suède a faits tant pour l'intérieur du royaume que pour le militaire, et les règles qu'il s'est proposé de suivre pendant un temps aussi critique et dangereux que le présent, sont si bonnes et sages qu'on n'y saurait ajouter quelque chose. Et comme il faut convenir qu'il est bien difficile encore de s'orienter sur les vrais desseins de la Russie et des puissances qu'elle s'est attachées, et que tout ce que l'on en a pu apprendre jusqu'ici, est si vague et incertain qu'il n'y a moyen de se fixer làdessus, la Suède a bien lieu d'être partout sur ses gardes, jusqu'à ce qu'on soit à même d'en juger avec précision.

A cette occasion, je veux bien vous dire que, si dans toutes ces entrefaites il ne s'agissait d'autre chose que d'un plan de changement de succession en Russie, en voulant substituer un autre à la place du grand-duc de Russie, et que le Danemark voudrait profiter alors de la conjoncture en s'emparant du Holstein tout de suite, je ne conseillerais jamais à la Suède de se commettre pour de pareils objets ni d'entrer en guerre là-dessus, parceque toutes les démarches et tous les efforts qu'elle voudrait faire à ces égards, seraient à pure perte et de conséquences assez dangereuses.

Pour ce qui concerne l'avis qui est parvenu au gouvernement, comme s'il s'agissait d'un traité entre la Suède et moi moyennant lequel la Suède me céderait sa Poméranie,388-2 afin qu'à mon tour je l'aidasse à récupérer la Livonie et ce qu'elle a perdu de la Finlande, je sais, à n'en pouvoir presque pas douter, que c'est à Vienne qu'on a forgé ces contes, et qu'on a tâché de les disséminer, avec bien d'autres mensonges encore, en Russie, en Angleterre et en différents autres lieux, même en Suède. C'est pourquoi j'ai été bien aise de voir que le comte<389> de Tessin leur a donné hautement le démenti, ce qui était bien nécessaire dans les conjonctures présentes.

Il y a encore une chose qui ne demande pas moins l'attention du ministère de Suède que toutes les autres affaires. C'est qu'il devrait nécessairement convenir à temps sur les arrangements à prendre pour la Diète à convoquer dès que le Roi sera décédé, et préparer en conséquence tout ce qui sera nécessaire pour prévenir tous débats ou longueurs, et. tout ce qui saurait empêcher que le gouvernement du nouveau roi ne se fît d'abord. Et comme vous savez assez les fortes et solides raisons qui exigent absolument qu'on ne touche pas le moins du monde à la forme du gouvernement, je souhaiterais encore qu'il y eût moyen de borner cette Diète extraordinaire là à la simple reconnaissance du nouveau Roi, à laquelle fin il faudrait convoquer les États à Upsala, heu ordinaire du couronnement, afin d'éviter par là la tenue d'un comité secret, qui ne saurait qu'entraîner infailliblement des longueurs, des discussions et peut-être même des intrigues dont les cours ennemies de la Suède ne manqueraient pas de profiter. Comme je ne suis pas assez au fait de la constitution du royaume pour savoir au juste si une telle Diète peut avoir lieu conformément aux lois du gouvernement, je veux que vous vous en expliquiez avec le comte de Tessin et avec le sieur de Rudenschöld et avisiez avec eux ce qu'ils en trouvent faisable. H serait toutefois à souhaiter qu'une telle Diète où il ne s'agirait simplement que de la reconnaissance et du gouvernement du nouveau Roi, pût avoir heu, afin de ne pas laiser le loisir ni fournir l'occasion aux ennemis de la Suède de semer de la discorde et de gagner par là le temps de parvenir à leurs vues pernicieuses.

Federic.

Nach dem Concept.



388-2 Vergl. S. 342.