3499. AU CONSEILLER PRIVÉ DE GUERRE DE KLINGGRÆFFEN A LONDRES.

Potsdam, 1er mars 1749.

J'ai bien reçu votre dépêche du 14 de février passé. Je ne ferais nulle difficulté à suivre le conseil que vous me suppéditez touchant les dettes sur la Silésie; je voudrais même faire encore plus d'efforts et m'arranger de la sorte, vis-à-vis de cette dette, que, quand j'aurais payé cette année les 200,000 écus que vous savez que je tiens prêts,397-1 je paierais tout le reste, tant du capital que des intérêts, l'année 1750. Mais le moyen de m'arranger sur ces choses-là et d'y prendre des mesures, pendant que je suis dans la plus grande incertitude par rapport à ces orages qui menacent tout le Nord d'une cruelle guerre? Ainsi donc, je ne puis point me décider sur le payement entier de ces dettes, avant que je ne sois tout-à-fait éclairé sur le sort du Nord, et que je ne sois certain qu'il n'y aura point de troubles; car si la guerre venait à s'y élever, il n'y aurait alors rien de plus naturel sinon que le payement des dettes sur la Silésie en cesserait. Mais si, au contraire, la tranquillité du Nord se confirme, et qu'il n'y ait là nulle guerre à craindre, alors l'on peut sûrement compter que je m'acquitterai fidèlement de cette dette et tâcherai d'en être tout-à-fait déchargé pendant le cours de l'année présente et celle qui va suivre, ainsi que tous les intéressés en seront satisfaits.

Vous dites que le roi d'Angleterre est obligé, s'il veut engager la nation dans une guerre, de trouver des prétextes au moins spécieux. J'en conviens, mais si son projet est d'en vouloir à la Suède, pour renverser la succession y établie, ne voudra-t-il prendre son prétexte des micmacs qu'il y a eu entre Guy Dickens et le ministère de Suéde?

S'il y a des brouilleries dans le Nord, elles n'arriveront qu'au sujet de la succession au trône de Suède, où je ne serai, directement, pour rien, et ce serait chercher de bien loin le prétexte pour colorer ces brouilleries que d'y mêler alors les dettes sur la Silésie, qui n'y ont pas la moindre relation.

Au surplus, puisque vous croyez que vous ne serez pas embarrassé pour vous orienter sur les desseins qu'on couve relativement aux affaires du Nord, si vous osiez agir, je vous permets de le faire et vous donne la liberté de vous en expliquer même avec le duc de Newcastle, quoique toujours fort amiablement et dans des termes qui n'indiquent nulle<398> aigreur, en lui insinuant que, puisque le monde ne cessait pas de parler de grands orages qui menaçaient le Nord et de traités qui se négociaient à cet égard, et que M. de Newcastle n'ignorait pas le traité défensif où j'étais avec la Suède, et que j'avais l'avantage de vivre en bonne intelligence avec l'Angleterre, vous le priez de vouloir bien s'expliquer amiablement envers vous là-dessus. Je connais trop votre sagacité et votre savoir-faire pour que je ne dusse m'attendre que vous tournerez ce secrétaire de tant de différentes façons qu'il n'en saura manquer que vous ne lui arrachiez quelques choses qui nous éclairciront plus que jusqu'ici les vrais desseins des deux cours impériales et de celle de Londres relativement au Nord. J'attendrai le rapport que vous m'en ferez.

Federic.

Nach dem Concept.



397-1 Vergl. S. 357.