3579. AU CONSEILLER BARON LE CHAMBRIER A PARIS.

Potsdam, 1er avril 1749.

J'ai tout lieu d'être satisfait de la réponse que le marquis de Puyzieulx vous a faite à l'entretien que vous avez eu encore avec lui et dont vous m'avez rendu compte par votre dépêche du 21 du mois passé de mars : je souhaite seulement que la France persévère dans ces sentiments et qu'elle continue à parler avec fermeté, et je suis persuadé qu'alors les nuages en l'air qui menacent un orage au Nord qui pourrait devenir fatal à toute l'Europe, pourraient encore se dissiper, sans qu'il en coûte plus à la France que de tenir bonne contenance et de se conduire avec fermeté contre ceux qui voudront mettre en combustion le Nord et renverser par là l'ouvrage de paix que la France a fait à Aix.

Mes dernières lettres de Londres me confirment dans ces sentiments, venant à m'apprendre que les déclarations faites au colonel Yorke, et à Londres par le sieur Durand, semblaient avoir, du moins en apparence, changé le cas. Il est sûr cependant que les deux cours impériales ne se rebuteront pas si aisément et quelles continueront à faire de nouvelles tentatives pour amener l'Angleterre à entrer dans leur concert. Outre ce que j'en ai appris déjà et que je vous ai communiqué en dernier<468> lieu par une de mes précédentes,468-1 je viens de découvrir encore par un canal très sûr, et de la manière la plus authentique, que, pour faire un nouvel effort d'entraîner l'Angleterre dans les concerts des deux cours impériales, le chancelier Bestushew, poussé par le ministre autrichien à Moscou, le comte Bernes, va donner encore un mémoire au ministre anglais, lord Hyndford, pour inviter de nouveau l'Angleterre d'accéder aux nouveaux engagements que les deux cours ont pris entre elles, cependant avec cette différence de la première invitation qu'ils ont faite, que dans celle-ci la cour de Russie ne demandera pas en termes clairs le renouvellement ou la prolongation de la convention de subsides, et cela par la raison que le chancelier Bestushew a cru être contraire à la dignité de l'impératrice de Russie de demander formellement la prolongation d'une convention que l'Angleterre a déclaré être expirée, mais qu'au lieu de cela on a tourné le mémoire de façon qu'on fera envisager au roi d'Angleterre le péril imminent et un danger pressant pour toutes ses possessions en Allemagne qu'il aurait à craindre, à moins qu'il n'entrât dans le concert des deux cours impériales. Outre cela, la cour de Vienne a pris à sa tâche d'animer l'Angleterre à offrir de soi-même à la Russie le renouvellement de la convention de subsides, sans que celle-ci y paraisse.

Voilà des faits sur lesquels vous pouvez compter et que je vous ne dis que pour votre direction seule. Au surplus, il m'est jusqu'ici impossible de pouvoir dire si les deux cours ne sont pas intentionnées et si elles ne se croient pas les reins assez forts de pouvoir entrer en guerre même sans le secours en argent de l'Angleterre, mes dernières nouvelles étant que leurs préparatifs de guerre continuent toujours d'aller leur grand train; mais ce que je puis dire positivement et ce que vous pouvez dire tout naturellement au marquis de Puyzieulx, c'est que toute la négociation présente des deux cours impériales ne roule que sur deux choses, savoir d'avoir l'Angleterre dans leur parti et d'en arracher des subsides, et, après y avoir réussi, de travailler alors à détacher le Danemark de la France et de disposer l'Angleterre de faire un traité de subsides avec le Danemark, dès que celui qu'il a eu jusqu'ici avec la France, expirera; avis sur lesquels le marquis de Puyzieulx peut fermement tabler. Au reste, j'ai à vous dire encore que vous me ferez plaisir de ne plus me recapituler de mot en mot le contenu des dépêches que je vous ai faites, quand vous m'y répondez, mais d'alléguer simplement et sommairement leur contenu et de vous étendre plutôt sur les réponses qu'on vous a données sur vos insinuations.468-2

Voici la réponse que je fais à la lettre du marquis de La Chétardie que vous m'avez adressée.

Federic.

Nach dem Concept.

<469>

468-1 Vergl. S. 458 Anm. 2.

468-2 Vergl. S. 434.