<113>

3890. AU CONSEILLER PRIVÉ DE LÉGATION BARON DE GOLTZ A MOSCOU.

Potsdam, 27 septembre 1749.

Votre relation du 4 de ce mois m'a été bien rendue. Puisque vous êtes déjà assez informé dans quels termes le sieur Panin a fait la déclaration au ministère de Suède dont il a été chargé par sa cour, je n'ai qu'à vous dire que celui-ci y a répondu avec un ton de fermeté que, le Prince-Successeur ayant de son propre mouvement renouvelé les assurances de ne vouloir en aucune manière s'écarter de sa capitulation, confirmée par serment, relativement à la présente forme du gouvernement, ni souffrir qu'il soit porté aucune atteinte aux droits de la liberté des États, toute crainte devait cesser et tout soupçon làdessus devenait injurieux, et si d'ailleurs, contre les sentiments mêmes du Prince-Successeur, on s'apercevait dans la suite de quelque tentative contraire aux droits et à la liberté de la nation à cet égard, on trouverait suffisamment dans les forces de la couronne et dans la vigueur du gouvernement les ressources nécessaires dont un pareil cas était susceptible, pour y remédier; mais si, nonobstant ces considérations, la Russie faisait passer à ses troupes les frontières du royaume sans une réquisition préalable et formelle, l'on devait déclarer d'avance qu'une pareille démarche, en quelque temps qu'elle se fasse, ne pourrait être regardée que comme une violation du droit des gens et une rupture ouverte qui forcerait la Suède, malgré le désir qu'elle avait de cultiver une parfaite intelligence avec la cour de Russie, à employer pour sa défense tous les moyens que Dieu lui avait mis en mains et que la dignité et l'indépendance de la couronne exigeaient.

Voilà à peu près les termes dont cette réponse a été conçue, mais que je ne vous communique que pour votre direction seule, avec défense expresse de vous en ouvrir à personne. C'est à présent de savoir quel effet cette déclaration fera sur la cour de Russie, qui se verra obligée ou d'en acquiescer, ou qui la prendra fort haut et en jettera partout des cris furieux. Aussi tâcherez-vous de vous en bien orienter et de m'en faire votre rapport de la manière la plus exacte et de façon que j'y pourrais compter.

Au surplus, je viens d'être averti par un bon canal que milord Hyndford n'a point du tout été édifié de la conférence qu'il a eue le 4 de ce mois avec le Chancelier,1 à qui il a voulu faire goûter le moyen dont la cour de Vienne est convenue avec celle de Londres pour raccommoder les affaires entre la Suède et la Russie, mais qui lui a répondu sèchement que les deux cours n'auraient point dû faire semblable pas sans en communiquer préalablement avec celle de Russie. Je sais, de plus, que milord Hyndford a fait toute sorte de remontrances au Chancelier, pour lui faire entrevoir les suites qui en résulteraient si



1 Vergl. S. 109. 110.