<150>

Vous ajouterez à cette occasion les réflexions suivantes : que la véritable raison pourquoi le chancelier Bestushew est aussi animé contre la Suède, s'origine principalement de ce qu'il souhaite du fond de son âme à voir la Suède dans la-même subordination de la Russie que celle où la Pologne se trouve, à laquelle il avait cru déjà avoir jeté les fondements, du commencement du règne de l'Impératrice sa souveraine. Mais quand il a vu que, depuis le temps que la Suède a fait cette alliance avec moi à laquelle la France accéda, elle a voulu se soustraire à la domination russienne, il en a été furieusement irrité, et sentant bien alors que la Suède lui était échappée et qu'il n'était plus aisé d'y pouvoir regagner la supériorité, il s'est avisé de se servir du prétexte de la crainte d'un prétendu dessein de changer la forme du gouvernement en Suède, principalement dans la vue qu'il pourrait par là s'y former un parti assez considérable d'entre les Suédois et le maintenir, afin de profiter de l'occasion de quelque Diète tumultueuse en Suède pour y culbuter le ministère présent. Voilà, à ce que je comprends, le vrai fond de toute l'affaire, et les motifs de tout les ressorts que le Chancelier a fait jouer jusqu'à présent.

Au surplus, la France ne saurait rien faire de plus avantageux et de plus efficace pour conserver la Suède de la domination de la Russie, que de se gouverner avec la Porte Ottomane de la manière qu'elle le fait actuellement, à laquelle je ne saurait que fort applaudir.1

Federic.

Nach dem Concept.


3950. AU MINISTRE D'ÉTAT COMTE DE PODEWILS, ENVOYÉ EXTRAORDINAIRE, A VIENNE.

Potsdam, 28 octobre 1749.

Vous avez sagement fait de ne rien communiquer au baron de Beckers de tout ce que je vous ai fait marquer concernant les sentiments du ministère de France touchant l'affaire des investitures2 des Princes de l'Empire.

La grande sécurité où la cour de Vienne paraît être à l'égard de la Porte Ottomane, lui pourra être fort nuisible. Je conviens avec vous que ladite cour est assez bien au fait par rapport aux affaires de la Turquie. Cependant, il m'a paru fort singulier que depuis quelques jours presque toutes les gazettes annoncent hautement des armements, en ce qu'elle faisait de grands amas de vivres dans ses forteresses



1 Puyzieulx hatte dem Baron Chambrier gesagt: „Nous avons réveillé la Porte Ottomane pour qu'elle se montrât et fit connaître à la Russie qu'elle ne pourrait pas voir tranquillement que la Suède fût inquiétée par elle, qu'elle avait des traités avec la Suède et qu'elle y satisferait, si elle [la Suède] était attaquée. Mais il ne fout qu'entretenir la Porte Ottomane dans ces dispositions, sans lui donner le soupçon qu'on veut la mener plus loin; autrement on courrait risque de la mettre sur ses gardes et de perdre sa confiance.“

2 Vergl. S. 130.