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contredit sur la probabilité qu'il en serait ainsi, mais je lui ai cependant fait sentir qu'un changement dans le ministère de Russie ou la mort du roi d'Angleterre pourraient y causer des obstacles insurmontables et déranger leurs projets. Je lui ai fait remarquer en outre qu'il me paraissait bien extraordinaire et presque incroyable que la France, sachant qu'elle a à gagner les électeurs de Bavière et de Trêves, l'aurait négligé jusqu'à présent et qu'elle aurait besoin d'y être poussée par Votre Majesté. Il m'a répondu que la France appréhendait que Votre Majesté ne devienne par là l'arbitre absolu de cette affaire en Allemagne.“

France doit être persuadée que je serais jamais incapable de la trahir par ma voix électorale, si elle savait gagner les voix de Bavière et de Trêves, pour avoir la majorité des voix des Électeurs, afin d'en disposer selon sa convenance. Mais dans la situation où sont actuellement les affaires, il me paraissait cependant que la gloire de la France, son honneur et le mien demandaient que nous tinssions ferme à ce que l'Électeur palatin eût, avant toute chose, et avant que nous condescendions à rien, une juste satisfaction sur les prétentions qu'il a à la charge de la maison d'Autriche, ce qui me paraît d'autant plus raisonnable parceque les cours de Londres et de Vienne ont fait des convenances à toutes les cours électorales qui se sont attachées à ce sujet, et qu'il faudrait pour autant de raison que le seul Électeur qui s'est tenu invariablement attaché à nous, eût aussi de la satisfaction sur ses justes prétentions.

Voilà ma façon de penser sur cette affaire et les arguments dont vous pourrez vous servir auprès les ministres de France, tant pour les faire connaître à eux, que pour les prier de me communiquer leurs sentiments, s'ils en ont qui sont différents, pour que je sache m'expliquer avec eux, et pour les convaincre que je ne veux jamais les engager dans des choses qui sauraient conduire à quelque guerre, à moins que le cas ne la demandât absolument.

Au reste, il y a encore une petite commission dont je voudrais bien vous charger; c'est qu'on m'a parlé fort avantageusement d'un certain abbé à Paris, nommé de Gua, de l'Académie Française, sur le grand savoir et expérience qu'il doit avoir pour faire nettoyer et rendre navigables les rivières. Comme je souhaiterais bien de me servir pour quelque temps de cet abbé à cet usage, vous lui parlerez, afin de le sonder s'il voulait bien résoudre à venir ici, pour que je l'en sache consulter; que je lui tiendrai compte des frais de son voyage et que d'ailleurs, si son invention réussissait ici, je lui donnerais une pension honnête sur des bénéfices ecclésiastiques qui sont à ma collation. Vous observerez que c'est un certain nommé Mitra à Paris qui est en intimité avec le susdit abbé et qui est très connu du valet de chambre que feu baron Le Chambrier a eu en son service, et que c'est celui-ci qui vous pourra amener ledit Mitra pour vous dire des nouvelles de l'abbé de Gua, et qui le saura introduire auprès de vous. J'attendrai à son temps le rapport que vous me ferez immédiatement sur ce sujet.

Federic.

Nach dem Concept.