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5222. AU LORD MARÉCHAL D'ÉCOSSE A PARIS.

Potsdam, 30 novembre 1751.

L'ordinaire dernière m'a bien apporté la dépêche que vous m'avez faite du 19 de ce mois. Quand toutes les insinuations et remontrances que vous avez faites en faveur des affaires du duc de Würtemberg,1 ne sauraient rien opérer sur les ministres de France, il faut bien s'en contenter et les laisser faire en ceci comme ils le voudront, quoiqu'il soit à appréhender que le Duc ne se jette alors entre les bras du parti contraire, et, bien que ce ne serait point un grand objet à la France, quand ce Prince s'en détachera, ledit parti en sera toujours grossi.

Quant aux affaires touchant la Suède, M. de Saint-Contest verra à sa satisfaction qu'il ne s'est point trompé sur mon sujet, dès qu'il aura lu les dépêches que milord Tyrconnell lui aura faites par son dernier courrier, puisque j'ai fait lire à celui-ci toute la correspondance qu'il y a eu depuis quelques mois entre moi et ma sœur en Suède,2 pour déraciner par là jusqu'au moindre soupçon de tout ce qu'on avait voulu imposer du contraire aux ministres de France.

Ce serait un grand coup de partie pour nous, si la France pouvait s'attacher le roi de Sardaigne; elle se passerait aisément alors du duc de Würtemberg et de tout ce qu'elle a perdu depuis peu d'alliés, et je crois que le moment d'y réussir est à présent le plus favorable et plus propre qu'il n'a été ni le sera dans bien d'années.

J'apprends que le voyage de l'électeur de Cologne pour la Bavière n'est pas encore aussi bien assuré qu'on l'a cru.3 C'est l'Électeur pa latin qui l'a invité par une lettre de passer par Manheim quand il irait à Mergentheim; l'on jugera de sa réponse s'il est déterminé pour le voyage de Bavière.

Milord Tyrconnell a eu encore quelque récidive de son mal,4 ainsi qu'il ne voit personne ni ne parle des affaires. Vous savez combien je souhaite que, le cas supposé que son état maligne le dût obliger à quitter son poste à ma cour, il soit remplacé par quelque sujet bien intentionné et à qui je saurais avoir confiance. J'ai vu et parlé ici au sieur Durand, quand il passa pour aller à la Haye; il m'a paru bien sage et un homme entendu et de pénétration, ainsi que je m'en accommoderais, quand même il lui manque les qualités de la naissance et du caractère, à quoi pourtant les ministres de France pourraient subvenir en quelque façon. Je souhaiterais que vous sauriez les sonder à ce sujet, mais, comme je n'ignore pas toute la délicatesse des ministres de France sur de pareils sujets, il faudrait que vous vous prissiez bien adroitement et d'une façon très délicate pour leur en faire des insinuations.

Federic.

Nach dem Concept.



1 Vergl. S. 521.

2 Vergl. S. 514. 519.

3 Vergl. S. 544.

4 Vergl. S. 475.