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4548. AU CONSEILLER BARON LE CHAMBRIER A PARIS.

Potsdam, 10 octobre 1750.

Votre relation du 28 du mois dernier m'a été bien rendue. Les réflexions que le roi de Pologne Stanislas1 vous a faites au sujet de la nécessité qu'il y a de faire envisager à la Porte Ottomane les suites qui résulteraient pour elle et ses alliés, si la Russie parvenait à maîtriser le Nord et acquérit plus d'influence dans les affaires de l'Europe, sont tout-à-fait justes, et il serait fort à souhaiter qu'il y appuyât auprès du ministère de France, afin que celui-ci en fît un bon usage. Pour ce qui regarde les propos qu'il vous a tenus touchant ce qu'il faudrait penser d'avance à quelque sujet convenable pour occuper le trône de Pologne quand il viendra à vaquer, j'avoue bonnement que je n'ai jusqu'à présent point songé à un évènement qui, selon les apparences, est encore assez éloigné. Mais pour savoir juger quelle sera la puissance laquelle, le cas existant, saura donner alors un roi à la Pologne, il faudrait être instruit d'avance si à ce temps-là la Russie sera en guerre avec les Turcs, ou n'osera pas remuer devant ceux-ci, auquel cas la Pologne saurait bien prendre son roi de la main de la France et de ses alliés. Sans ce cas-là, la bonne raison demande que je ne me commette pas à une chose qui pourrait m'attirer une guerre ruineuse ou du moins aucunement avantageuse. Et comme d'ailleurs je n'ai nulles vues particulières par rapport à la Pologne, il me saura être indifférent si un duc de Parme, un prince de Saxe ou quelque Piaste vient à succéder à la couronne de Pologne, quand elle vaquera.

Vous ne manquerez pas de faire un usage convenable de tout ceci, s'il arrive que le roi Stanislas vous parle encore à ce sujet, auquel vous ne laisserez pas de dire toutes les choses les plus obligeantes de ma part, aussi souvent que l'occasion s'y présente.

Federic.

Nach dem Concept.


4549. AU COMTE DE TYRCONNELL, MINISTRE DE FRANCE, A BERLIN.

Potsdam, 10 octobre 1750.

Milord. La confiance sans réserve que j'ai mise en vous, et le désir de communiquer fidèlement à votre cour tout ce qui vient à ma connaissance et qui saurait avoir quelque rapport à ses intérêts, ont été les motifs de ce que je vous adresse l'extrait ci-clos d'une lettre assez intéressante, écrite en dernier lieu, sans chiffre, du ministre autrichien à la cour de Munich,2 au comte Puebla, et dont quelqu'un des miens a trouvé moyen de tirer copie.

Votre droiture reconnue me sert de sûr garant que vous me garderez le secret le plus absolu là-dessus, que vous n'en toucherez rien à âme qui vive, et qu'en la faisant passer à votre cour, vous prendrez



1 Vergl. Bd. VI, 239.

2 Widmann.