4431. AU CONSEILLER DE LÉGATION WARENDORFF A SAINT-PÉTERSBOURG.

Potsdam, 28 juillet 1750.

La dépêche que vous m'avez faite du 11 de ce mois, m'est bien parvenue. Avant que d'entrer dans aucun détail là-dessus, je vous recommande encore et vous ordonne sous peine de mon indignation que vous deviez éviter soigneusement de ne parler ni au Chancelier ni à aucun de ceux qui lui sont attachés, comme le sieur de Swart et d'autres, de la résolution que la cour de Russie a prise de renforcer ses troupes en Livonie et en Finlande, ni d'en faire apparaître la moindre inquiétude ou appréhension, mais de faire plutôt semblant comme si rien n'en eût été et que vous l'ignoriez entièrement et n'y fassiez aucune attention, j'ai mes raisons particulières pour vous donner ces ordres, et d'ailleurs il ne résulterait rien des mouvements que vous vous donneriez à ce sujet, puisqu'il est constaté que les démonstrations guerrières que la cour de Russie fera pendant le cours de cette année, ne seront que des ostentations toutes pures qui ne feront nulle impression sur moi.

Je vous sais bon gré de la communication que vous m'avez faite des nouvelles que le courrier extraordinaire, dépêché par le sieur Neplujew, a apportées. Outre que ces nouvelles ne laisseront pas de donner bien à penser aux deux cours impériales, je présume qu'il y en a encore d'autres plus fortes et bien désagréables au Chancelier, puisque j'estime que, s'il n'y avait que celles de la disgrâce du Mufti et du rappel de Sàid-Effendi, le sieur Neplujew n'aurait pas envoyé un courrier extraordinaire.

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Je suis bien persuadé que le premier point de vue du comte Bestushew n'est autre à présent que de faire jouer tous les ressorts imaginables pour brouiller par ses intrigues les délibérations de la Diète qui va se tenir en Suède, et pour culbuter le ministère présent; mais j'ai lieu de douter que l'Angleterre voudrait fournir aux frais, et pour le peu qu'il faudra pour corrompre quelques Suédois mal intentionnés, je crois que la cour de Russie le trouvera encore dans ses propres fonds.

L'anecdote que vous m'avez marquée par rapport aux intrigues amoureuses du Hetman,32-1 ne m'a point déplu. Je plains la situation où la Grande-Duchesse se trouve; il serait bien à souhaiter que, pour qu'elle en saurait sortir, elle donnât un héritier au Duc son époux.

Federic.

Nach dem Concept.



32-1 Graf Cyrillus Rasumowski.