4861. AU CONSEILLER BARON LE CHAMBRIER A PARIS.

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Chambrier berichtet, Paris 15. März: Votre Majesté „aura vu ce que je Lui ai marqué de très particulier, il y a quinze jours, touchant le marquis de Puyzieulx et son dégoût pour sa place, aussi bien que sur la façon de penser du comte de Saint-Séverin pour la même place.313-3 Ce que j'ai donc appris tout récemment, est que le marquis de Puyzieulx a commencé de travailler avec le roi de France en présence de la marquise de Pompadour, en suite de la représentation qu'il a faite à ce Prince — après s'être concerté apparemment avec cette maîtresse — qu'il était du bien de son service qu'elle fût présente au travail qu'il aurait l'honneur de faire avec lui. Le marquis de Puyzieulx a cru sans doute, par le conseil du comte de Saint-Séverin, qu'il fallait qu'il se liât avec la marquise de Pompadour, en la mettant, pour ainsi dire, de moitié dans les affaires politiques, pour

Potsdam, 29 mars 1751.

Vos rapports du 15 et du 19 de ce mois me sont heureusement parvenus. A la vérité je ne m'étais nullement attendu à apprendre de vous une nouvelle aussi frappante que celle que vous m'avez marquée par la feuille jointe pour moi seul à vos rapports. Mais comme je comprends que c'est à présent une affaire toute faite, je vous ai toute l'obligation imaginable de ce que vous avez l'attention pour moi de m'en informer d'abord et de me communiquer vos pensées là-dessus.

Comme aussi dans tout ce que j'ai à traiter avec la France, je ne vise qu'au bien de mes affaires et

faire reprendre au Roi son maître des sentiments plus favorables pour lui, et la marquise de Pompadour de son côté en aura été charmée vraisemblablement, pour se faire plus valoir dans l'esprit du roi de France, en lui développant des talents dont il ne l'a pas crue capable jusqu'à présent.314-1 La voilà donc à portée de prendre connaissance des plus grandes affaires. Je ne sais pas si elle avait déjà su sur cela quelque chose, il y a quelque temps, mais ce que je sais bien, est que, comme je suis sa plus ancienne connaissance parmi les ministres étrangers, elle me fit des agaceries dans le dernier voyage de Fontainebleau, sur ce qu'elle ne me voyait pas souvent. Peut-être se proposait-elle déjà alors de tâcher de se mêler dans la politique, et que, comme Votre Majesté est l'allié le plus considérable du roi de France, elle voulait se préparer une route, en me voyant, qui pût la favoriser dans son dessein.... Si la marquise de Pompadour a quelque étoffe en elle-même pour entrer dans les grandes affaires, et que je visse dans quelque temps qu'on peut faire quelque chose par son moyen, il pourrait peut-être convenir à Votre Majesté que cette femme pût se flatter, pour la rendre de bonne foi et ardente pour Votre Majesté, qu'elle trouvât en Elle un soutien pour la faire valoir auprès du roi de France. C'est une affaire à ménager avec dextérité suivant que le nouveau rôle qu'elle vient de commencer, se soutiendra à son avantage, et qu'on verra le parti qu'elle saura en tirer pour la faveur et son influence.“

à celui de nos intérêts communs, il me saura être au bout du compte indifférent à qui de l'un et de l'autre sexe je dois m'adresser sur ces sujets, pourvu que tout succède bien. C'est pourquoi je laisse à votre dextérité et prudence de faire à Madame de Pompadour autant de visites et de politesses, de même que d'insinuations et d'assurances de ma part, que vous trouverez convenables à mes intérêts.

Si elle soutient bien son nouveau rôle, j'en serai principalement réjoui pour l'amour de M. de Puyzieulx, qui oubliera les dégoûts qui lui étaient arrivés, et restera dans sa place. Je souhaite seulement que la maîtresse se prête toujours aux inspirations qu'il lui donnera, et qu'elle ne s'avise jamais de jeter un jour la bride de-dessus de sa tête.

Pour ce qui regarde le mémoire qui vous a été adressé de la part de M. le prince de Ligne en faveur du sieur Pauly, vous devez lui insinuer que, quelque envie que j'aie de lui marquer mon attention, et les égards que j'ai pour ses intercessions, cependant la fondation de cet ordre de la Croix du Mérite était de ne pouvoir être conféré qu'à des personnes qui sont actuellement en mon service, et qu'il n'y avait jusqu'ici nul exemple qu'il fût conféré à d'autres; qu'ainsi j'étais fâché de me voir obligé de suspendre ma bonne volonté pour lui, mais que, s'il pouvait faire plaisir au sieur Pauly d'être revêtu de ma part de la croix de l'ordre de la Générosité, je la lui accorderais volontiers en égard de la protection dont M. le prince de Ligne l'honorait.

Federic.

Nach dem Concept.

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313-3 Vergl. S. 292 Anm. 1.

314-1 Vergl. S. 230 Anm. 1.