5233. AU LORD MARÉCHAL D'ÉCOSSE A PARIS.

Berlin, 7 décembre 1751.

Vos dépêches du 26 du mois dernier de novembre m'ont été heureusement rendues. Je suis d'accord avec M. de Saint-Contest que le meilleur parti à prendre au sujet de l'élection d'un roi de Pologne,553-2 en cas de vacance, est de n'en prendre aucun jusqu'à ce que le cas arrive; mais comme j'ai de forts soupçons qu'il se chipote là-dessus quelque chose entre les cours de Vienne et de Pétersbourg en faveur du prince Charles de Lorraine, et que nous n'ignorons pas que le premier ministre de Russie, le grand-chancelier Bestushew, a sacrifié bien d'autres intérêts essentiels de la Russie à l'Autriche, j'ai cru devoir avertir confidemment M. de Saint-Contest de ce que j'ai de soupçons là-dessus. Et s'il ne convient point, à ce qu'il pense, de prendre quelque concert entre nous, en supposant que le cas soit tel que je le soupçonne, je crois cependant qu'il n'y aurait nul inconvénient, si la France<554> en faisait sonder les ministres de la Porte Ottomane, pour en tirer quelque assurance que, si jamais le cas arrivait, elle s'y opposerait de toutes ses forces. Ce que vous tâcherez d'insinuer à M. de Saint-Contest, quand une occasion convenable s'y offrira.

Au surplus, ce ministre a bien deviné sur ce qui regarde les affaires de la république de Hollande, et jusqu'à présent il n'y a point eu de changement dans les affaires de ce pays-là.

Mes dernières lettres de Londres marquent qu'on y avait la nouvelle que le roi de Sardaigne s'était déterminé à entrer comme partie contractante dans le traité qui se négocie entre les cours de Madrid et de Vienne. J'ignore encore si cette nouvelle est fondée ou non; en attendant, je vous la communique telle que je l'ai reçue.

J'ai appris avec douleur ce que vous me marquez du grand dérangement des finances de la France; j'en suis plus fâché que la France perde par là la considération et l'influence qui lui est due dans les grandes affaires, de façon que son état est pire dans un temps de paix qu'il n'a été dans celui de guerre. Je laisse à votre jugement s'il n'y a pas moyen, et s'il convient que vous tâchiez de faire insinuer, par la main tierce ou quatrième et avec bien du ménagement, qu'avec toute la puissance et les forces où la France se trouvait, sa gloire s'évanouirait, à moins qu'on ne changeât de mesures touchant sa finance.

Je ne doute nullement que le comte Loss n'eût fait à présent la même déclaration au sujet du traité de subsides fait avec les Puissances maritimes que le ministre de Saxe, le sieur de Bülow, nous a faite ici.554-1 Au reste, comme je souhaiterais fort de savoir si le Dauphin a beaucoup de prédilection pour la Saxe et pour le Roi son beau-père, vous vous en informerez exactement, afin de me faire votre rapport làdessus immédiatement.

Federic.

Nach dem Concept.



553-2 Vergl. S. 513. 516.

554-1 Vergl. S. 536.