5865. AU CONSEILLER PRIVÉ DE GUERRE DE KLINGGRÆFFEN A VIENNE.

Berlin, 21 avril 1753.

Votre rapport du 11 de ce mois m'a été bien rendu. Les différents arrangements militaires que la cour où vous êtes prépare parmi ses troupes en Bohême et en Moravie pour assembler un corps considérable de troupes entre Pilsen et Égra dont je vous ai déjà averti par ma dépêche précédente, m'obligent de vous dire que, s'il est possible que vous sachiez pénétrer les vues de cette cour et ce qui s'y passe à mon égard, c'est à présent le moment de le faire, pour bien approfondir ses mauvais desseins contre moi, afin de m'informer exactement avec combien d'adresse cette cour tâche d'armer contre moi les Saxons et les Hanovriens; car, selon de bons avis qui me sont revenus de Dresde, il se machine bien des choses à mon égard entre ces trois cours, et je me confirme de plus en plus dans mes soupçons que la course du chevalier Williams à Vienne n'a pour objet principal que de concerter des projets pernicieux contre moi, quoiqu'on tâche de masquer tout ceci au possible. Je dois même présumer que le courrier qui en conséquence de votre dernier rapport a été dépêché pour la Russie, n'y a porté d'autres dépêches que relativement à ces concerts. Le pis dans cette affaire est que je n'ai pu rien découvrir jusqu'à présent sur ces concerts, ni voir clair s'ils regardent l'offensive ou la défensive. Ainsi il y aura de la nécessité absolue que vous redoubliez d'attention là-dessus et que vous employiez vos canaux ordinaires tout comme d'extraordinaires, pour vous bien orienter sur ces complots et pour me tirer, par les informations exactes que vous m'en donnerez et sur lesquelles je puisse tabler, le plus tôt le mieux de l'état d'incertitude où je suis actuellement à cet égard.

L'article le plus intéressant pour moi sera de savoir bien si les mesures que la cour de Vienne prend à présent, sont offensives ou défensives; aussi, pour que [je sois] d'autant plus à même de bien juger<408> sur ces machinations, vous devez observer soigneusement si la cour où vous êtes fera assembler des milices en Hongrie, dans les contrées voisines de la Silésie, si elle tire des régiments de cavalerie de la Hongrie, pour les faire passer en Bohême et en Moravie, si elle fait marcher d'autres régiments encore de l'Autriche, de la Styrie, de la Carnie408-1 et du Tyrol, pour les envoyer pareillement en Bohême, circonstances sur lesquelles vous devez avoir bien plus d'attention que sur tout ce que le chevalier Williams joue d'intrigues à Vienne, et qui sauront me mettre au fait des vues et desseins de la susdite cour.

Au surplus, quand vous serez informé de quelques circonstances qui sauraient mériter mon attention, vous pouvez bien me dépêcher immédiatement le rapport que vous m'en ferez, par un de vos domestiques affidés, pour que j'en sois averti le plus tôt le mieux et me sache diriger là-dessus. Enfin, je vous recommande d'employer, avec ce zèle et cet attachement que je vous connais pour mon service, toute votre adresse pour bien démêler ces affaires et pour ne pas me laisser rien ignorer de tout ce qui y a du rapport.

Quant à la Russie, je ne crois pas que la cour de Vienne y gagnera beaucoup ni que celle-ci la pourra entraîner dans des mesures offensives.

Federic.

Nach dem Concept.



408-1 Sic.