<238>Dans le Brandebourg et dans la plupart des provinces de l'Allemagne, le peuple portait impatiemment le joug du clergé romain : c'était une religion trop onéreuse pour des pays aussi peu opulents; le purgatoire, la messe des morts et des vivants, le jubilé, les annates, les indulgences, les péchés véniels et mortels, les pénitences changées en amendes pécuniaires, les affaires matrimoniales, les vœux, les offrandes, étaient autant d'impôts que le pape levait sur la crédulité, et qui lui donnaient des revenus aussi solides que le Mexique en fournit à l'Espagne. Ceux qui les payaient étaient épuisés et mécontents; il n'était donc pas même nécessaire d'employer l'évidence des arguments, pour disposer ces esprits à recevoir la réforme; ils criaient contre le clergé qui les opprimait; un homme vint, qui promit de les en délivrer, et ils le suivirent.

Joachim II fut le premier électeur qui embrassa la religion luthérienne; sa mère, qui était une princesse de Danemark, lui communiqua ses sentiments, car la nouvelle doctrine avait pénétré en Danemark, avant que d'être reçue dans le Brandebourg. Le pays suivit l'exemple du prince, et tout le Brandebourg se fit protestant. Matthieu Jagow, évêque de Brandebourg, administra le sacrement sous les deux espèces dans le couvent des moines noirs; ce couvent devint ensuite la cathédrale de Berlin. Joachim II se distingua dans le parti, tant par les lettres de controverse qu'il écrivit au roi de Pologne, que par les discours éloquents, à ce que disent les auteurs,50 que ce prince prononça à la diète d'Augsbourg, en faveur des protestants.

La réforme ne put point détruire toutes les erreurs; quoiqu'elle eût ouvert les yeux du peuple sur une infinité de superstitions, il s'en conserva encore beaucoup d'autres, tant la pente de l'esprit humain


50 Lockelius; Annales de Brandebourg. [Ces auteurs ne parlent pas de discours éloquents prononcés par Joachim II; mais Angelus fait mention des trois discours que l'électeur Joachim Ier prononça à la diète d'Augsbourg, en 1530.]