<172>Je te perds donc aussi, doux espoir de ma vie,
Prince aimable, que Mars aurait dû préserver
Des flèches du trépas que lançait en furie
Ce parricide bras que ton cœur sut braver!
Sur la fin de mes jours, ma vieillesse pesante,
Hélas! n'a pu ravir à la mort dévorante
Que tes membres sanglants.
Quoi! je vois la lumière
Pour fermer la paupière
A mes plus chers parents!

Il n'est point de mortels dont l'âme courageuse
Résiste sans frémir à ces coups d'Atropos.
O vous, ma tendre sœur, mère trop malheureuse!
Vous perdez votre fils, vous perdez un héros.
Comme un rapide éclair, rayonnant de lumière,
Au premier pas qu'il fait, entrant dans la carrière,
Il disparaît soudain;
Telle au printemps la rose
Demeure à peine éclose
L'espace d'un matin.

La fureur insensée où s'emporte l'Europe
Répand le sang abject et le sang précieux;
Le fer frappe à la fois et le cèdre et l'hysope,
Et le soldat obscur et le chef généreux.
L'âge du vieux Nestor, la jeunesse d'Achille,
Trop faibles protecteurs, ne servent point d'asile
Contre l'arrêt du sort;
Cette race proscrite
Pousse et se précipite
Dans les bras de la mort.