<4>Si je n'habite plus cette orageuse cour
Où tant d'illusions environnent l'amour,
Un sentiment plus fin, plus noble et plus solide,
De ce bonheur perdu sait remplacer le vide.
O divine Amitié! présent chéri des deux!
Ce n'est que dans ton temple où vivent les heureux.
J'ai connu le bonheur depuis que dans mon âme
Tu daignas allumer cette pudique flamme;
Ton doux contentement n'est jamais combattu
Par les étroits devoirs qu'impose la vertu.
C'est toi, fille du ciel, dont l'appui secourable
Du déclin de mes jours rend la fin supportable
Par le cœur dont ta main m'a rendu possesseur.
Ce noble sentiment, vous l'éprouvez, ma sœur.
Ce cœur que je chéris, quel est-il? c'est le vôtre;
Lui seul, il me suffit, je renonce à tout autre
Qui, volage, indiscret, habile à m'imposer,
De la vertu se pare afin d'en abuser.
Je trouve tout en vous, esprit, vertu, tendresse,
Et l'indulgent support qu'exige ma vieillesse;
A vous à cœur ouvert je puis me confier.
Quel malheur quand d'amis il faut nous défier!
On sent, on vit en eux, c'est un autre soi-même;
J'existe doublement dans une sœur que j'aime.
Que la jeunesse, aveugle en ses égarements,
Se livre au tourbillon de ses plaisirs bruyants;
Que de cent nouveautés la lanterne magique
Réveille son ennui d'un sommeil léthargique :
Je vois, sans l'envier, prospérer ses beaux jours,
J'ai pour calmer mes maux trouvé d'autres secours;
Vous avez vu, ma sœur, jusqu'où s'étend leur nombre.
Ainsi, sans que les ans me rendent morne ou sombre,