<40>Et, tenant lieu pour nous de l'éponge du temps,
Imposer le silence à nos gémissements?
Si tout est arrangé, si tout est nécessaire,
Ce qui se fait a dû se faire;
Dans l'Olympe nos cris ne sont point entendus,
Et les jours qu'on se désespère
Ne sont que des moments perdus.
Passe encor qu'une âme commune,
En des malheurs inattendus,
Succombe sous son infortune;
Mais quand on a reçu du ciel
Le noble cœur d'une héroïne,
Lorsqu'on a comme vous l'âme toute divine,
On dompte les sanglots et le chagrin cruel.
Le monde, dès notre naissance,
Est l'école de la souffrance;
Des instants de prospérités
Sont emportés dans la balance
Par des torrents d'adversités.
Tous les temps ont fourni des spectacles tragiques,
Nos malheurs ont rempli les fastes historiques,
Tant l'homme est né sujet d'un destin ennemi.
Achille aux champs troyens enterra son ami,
Orphée a par deux fois perdu son Eurydice,
Thésée aux sombres bords laissa Pirithoüs,
Pénélope longtemps pleura son cher Ulysse,
La mort de Scipion foudroya Lélius.
Cicéron, désolé du trépas de Tullie,
Prétend que sa tombe ennoblie
Se transforme en un temple où vivront ses vertus,
Et cette attente encor ne put être remplie :