<68>« Je viens du palais d'Uranie,
Dit-il, pour te sauver d'Argens;
C'est mon fils, je suis son Élie,
Que mon esprit le fortifie.
Ses docteurs sont des ignorants;
Son mal n'est point la pulmonie,
C'est réplétion de génie.
Il faut que son cerveau purgé
Soit subitement déchargé
Par une main sage et hardie
Du fiel que contre les bigots
Il a distillé dans son âme,
Sinon tu verras qu'Atropos
Va sans pitié trancher sa trame.
Laisse-lui déchirer ...,
Qu'il travaille sur Ocellus,a
Et que son ardeur ranimée
Commente longuement Timée,a
En frondant cet amas d'abus
Dont tous les peuples sont imbus. »
Il disparaît, et je m'éveille.
Ah! marquis, mettez à profit
Le récit de cette merveille;
Qu'il soit ainsi que Bayle a dit.
Déjà votre teint s'éclaircit,
Votre peau redevient vermeille,
La mort vous respecte et s'enfuit.
La santé paraît; votre rhume,
Se distillant par votre plume,


a Le marquis d'Argens publia une édition d'Ocellus en 1762 et une de Timée en 1763. Voyez la correspondance de Frédéric avec le marquis d'Argens.