<134> de sentiment. Vous voyez les objets d'un point de vue qui les adoucit en les affaiblissant; mais si vous étiez une heure ici, que ne verriez-vous pas! Adieu. Ne vous fatiguez point l'esprit de soins inutiles, et, sans prévoir l'avenir, conservez votre tranquillité tant que vous le pourrez. Vous n'êtes point roi, vous n'avez ni à défendre l'État, ni à négocier, ni à trouver des expédients à tout, ni à répondre des événements. Pour moi, qui succombe sous ce fardeau, c'est à moi seul d'en souffrir la peine; laissez-la-moi, cher marquis, sans la partager. Je vous embrasse, en vous assurant de mon estime. Vale.

100. AU MÊME.

(Freyberg) janvier 1760.

J'oubliai, en vous écrivant dernièrement, mon cher marquis, de vous prier de faire remettre à mon frère Ferdinand et au général Seydlitz, qui est blessé et se fait guérir à Berlin, un exemplaire à chacun de mon Charles XII. C'est une petite attention qui peut-être leur fera plaisir. Ma situation ne change en rien, et je suis toujours aussi inquiet pour l'avenir que je l'ai été jusqu'ici. Mandez-moi, pour m'amuser, les mensonges de votre prophète et les sornettes qui parviennent à vos oreilles. Veuille le ciel que cette paix dont on parle commence bientôt à nous donner des espérances plus solides que celles que nous avons jusqu'à présent, et que nous voyions nos peines et nos travaux terminés par une paix durable et avantageuse! Adieu, cher marquis; je vous embrasse, et je fais mille vœux pour votre contentement.