<412> pour eux, puisqu'il est sûr qu'ils y ont perdu plus que nous. J'ai l'honneur, etc.

276. AU MARQUIS D'ARGENS.

Péterswaldau, 28 (octobre 1762).

Je vous annonce, mon cher marquis, que j'en suis au vingt-huitième tome de Fleury, de sorte que, si je compte juste, il ne m'en reste que huit à lire,a ce qui sera dans peu expédié, après quoi je me servirai de l'antidote de Timée pour me purger de tout le venin théologal et absurde que je puis avoir sucé par une si longue lecture. Votre livre est très-bon; il n'y a aucune comparaison à faire avec un ouvrage nourri de raisonnements philosophiques, et rempli d'érudition, avec de petits vers que je fais de temps en temps pour me distraire, mais que je crois très-éloignés d'être bons ou parfaits. Je ne vous gêne point sur le Plutarque; vous en userez à cet égard comme il vous plaira. Il y a des choses admirables dans cet ouvrage; mais la traduction française en est si barbare, qu'on n'en soutient pas la lecture. Je me suis trouvé, par rapport à ce livre, penser comme le cardinal Bembe pensait de la Bible, qu'il ne voulait pas lire, disait-il, de crainte de gâter sa latinité. Cela vous paraîtra bien douillet et bien délicat, car on ne lit pas tant pour se former le style que pour s'instruire. Je vous avoue que j'aime l'élégance, et qu'il faut un fond


a Nous présumons que l'exemplaire de Fleury dont Frédéric se servait alors est celui qui se trouve à la Bibliothèque royale de Berlin, en trente-six volumes in-8, reliés en maroquin rouge et dorés sur tranche, savoir : l'Histoire ecclésiastique, par M. Fleury (jusqu'à l'an 1414), nouvelle édition, Paris, 1740, vingt volumes, et l'Histoire ecclésiastique, pour servir de continuation à celle de M. l'abbé de Fleury (jusqu'à l'an 1595), Paris, 1737-1741, seize volumes.