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73. DU MARQUIS D'ARGENS.

Wolfenbüttel, 9 septembre 1759.



Sire,

Je vais me rendre à Berlin; j'y attendrai les nouveaux ordres de V. M., et je suis toujours prêt à aller où vous souhaiterez. Je vous supplie, Sire, de n'avoir aucun égard à ma santé; quand elle serait encore plus faible, elle deviendra forte dès le moment que je pourrai avoir le bonheur de vous voir.

Quand j'arrivai à Tangermiinde, tout était si rempli d'étrangers. qu'il me fut impossible de trouver un logement. Je ne voulus pas rester dans des villages, à cause des petits partis de l'armée de l'Empire qui rôdaient aux environs de Magdebourg et de Halberstadt, et je poussai ma route jusqu'à Wolfenbüttel, où je suis encore, et d'où je partirai demain. Je n'ai jamais douté, Sire, que vous ne réparassiez bientôt l'échec de la dernière bataille, et je suis convaincu que tout ira bien à la fin, et beaucoup mieux que vous ne le pensez, pourvu que vous conserviez votre personne; c'est en elle seule que réside la conservation de votre État. V. M. aura sans doute vu la lettre du maréchal de Belle-Isle qu'on a trouvée à Detmold, dans les papiers du maréchal de Contades. Il n'y a rien de si affreux que les projets de renouveler dans le pays de Hanovre les horreurs du Palatinat, et de faire un désert avant le mois de septembre (ce sont les propres termes de M. de Belle-Isle) de cet électorala Cet homme deviendra le mépris de tous les honnêtes gens, dans quelques partis qu'ils soient. Je ne doute pas que le roi d'Angleterre ne pense dorénavant sérieusement aux affaires de l'Allemagne; il connaît aujourd'hui ce qu'il doit attendre de ses ennemis; que deviendraient ses États en Allemagne, si malheureusement vous veniez à succomber? Si l'on


a Voyez t. XV, p. XII, XIII, et p. 142-145.