<100>De leur côté, les Suédois n'étaient pas aussi heureux que leurs alliés : un détachement de douze mille hommes avait été taillé en pièces par les Russes, auprès de Willmanstrand. Cet échec était considérable pour ce royaume affaibli et ruiné depuis Charles XII. La France en fut mortifiée; elle se proposa de redresser d'un autre côté le revers qu'avaient essuyé ses alliés : elle voulut que le maréchal de Maillebois, avec l'armée qu'il commandait en Westphalie, pénétrât dans l'électorat de Hanovre, pour se rendre maître de ces États. Le Roi fit une grande faute alors en employant tout son crédit pour dissuader les Français de ce dessein, alléguant que par cette entreprise ils se rendraient odieux à l'Europe, révolteraient contre eux tous les princes d'Allemagne; et qu'allant s'attacher à un objet de peu d'importance, ils négligeraient l'objet principal, qui était d'écraser la reine de Hongrie avec toutes leurs forces. Les Français auraient pu réfuter facilement un raisonnement aussi faible : s'ils avaient pris alors l'électorat de Hanovre, jamais le roi d'Angleterre n'aurait pu faire des diversions sur le Rhin, comme en Flandre.

Il ne manquait plus que la garantie de la France au traité que le Roi avait fait avec l'électeur de Bavière. On pressait M. de Valori de la procurer : sa cour faisait encore des difficultés sur la cession de la principauté de Glatz, et sur quelques portions de la Haute-Silésie. Il lui arriva, étant auprès du Roi, de laisser tomber par hasard un billet de sa poche : sans faire semblant de rien, le Roi mit le pied dessus;a il congédia le ministre au plus vite. Ce billet était de M. Amelot, secrétaire des affaires étrangères; il portait de n'accorder Glatz et la Haute-Silésie à la Prusse qu'au cas qu'il en résultât un plus grand inconvénient s'il les refusait. Après cette découverte, M. de Valori fut obligé d'en passer par où l'on voulut. Les desseins des Français sur le pays de Hanovre s'ébruitèrent, et parvinrent bientôt au roi d'Angleterre. Ce prince crut son électorat perdu : il n'avait pas le temps


a Voyez Mémoires des négociations du marquis de Valori. Paris, 1820, t. I, p. 71 et 129.