<43> retarde les productions de la terre. Cette crise dura jusqu'à la fin du règne de Louis XIII, où le cardinal de Richelieu, ensuite Mazarin, et surtout Louis XIV, donnèrent une protection éclatante aux sciences comme aux beaux-arts. Les Français étaient jaloux des Espagnols et des Italiens, qui les devançaient dans cette carrière; et la nature fit naître chez eux de ces génies heureux, qui bientôt surpassèrent leurs émules. C'est surtout par la méthode et le goût plus raffiné que les auteurs français se distinguent.

Ce qui retarda le progrès des arts en Allemagne, ce furent les guerres qui se suivirent depuis Charles-Quint jusqu'à celle de la succession d'Espagne. Les peuples étaient malheureux, et les princes, pauvres. Il fallut penser premièrement à s'assurer les aliments indispensables, en remettant les terres en culture; il fallait établir les manufactures selon que les premières productions les indiquaient : et ces soins presque généraux empêchèrent que la nation pût se tirer des restes de la barbarie dont elle se ressentait encore; ajoutez qu'en Allemagne les arts manquaient d'un point de ralliement, comme étaient Rome et Florence en Italie, Paris en France, et Londres en Angleterre. Les universités avaient, à la vérité, des professeurs érudits, pédants et toujours dogmatiques; personne ne les fréquentait, à cause de leur rusticité. Il n'y eut que deux hommes qui se distinguèrent à cause de leur génie, et qui firent honneur à la nation : l'un, c'est le grand Leibniz, et l'autre, le docte Thomasius. Je ne fais point mention de Wolff,a qui ruminait le système de Leibniz, et rabâchait longuement ce que l'autre avait écrit avec feu. La plupart des savants allemands étaient des manœuvres : les français, des artistes; ce fut la cause que les ouvrages français se répandirent si universellement, que leur langue remplaça celle des Latins, et qu'à présent quiconque sait le français, peut voyager par toute l'Europe sans avoir besoin d'un interprète. L'usage de cette langue étrangère fit encore du tort


a Voyez t. I, p. 263 et 268.