<349>Vous serviront de médecines,
Et je serai votre docteur.
Soit, j'y consens, si par avance,
Voltaire, de ma conscience
Vous devenez le directeur.

Je suis bien aise d'apprendre que le vin de Hongrie est arrivé à Bruxelles. J'espère apprendre bientôt de vous-même que vous en avez bu, et qu'il vous a fait tout le bien que j'en attends. On m'écrit que vous avez donné une fête charmante, à Enghien,a au duc d'Aremberg, à madame du Châtelet, et à la fille du comte de Lannoi; j'en ai été bien aise, car il est bon de prouver à l'Europe, par des exemples, que le savoir n'est pas incompatible avec la galanterie.

Quelques vieux pédants radoteurs,
Dans leurs taudis toujours en cage,
Hors du monde et loin de nos mœurs,
Effarouchaient, d'un air sauvage,
Ce peuple fou,b léger, volage,
Qui turlupine les docteurs.
Le goût ne fut point l'apanage
De ces misérables rêveurs
Qui cherchent les talents du sage
Dans les rides de leurs visages,
Et dans les frivoles honneurs
D'un in-folio de cent pages.
Le peuple, fait pour les erreurs,
De tout savant crut voir l'image
Dans celle de ces plats auteurs.
Bientôt, pour le bien de la terre,


a Voltaire écrit à Helvétius, le 6 juillet 1739 : « Je suis actuellement avec madame du Châtelet à Enghien, chez M. le duc d'Aremberg, à sept lieues de Bruxelles. Je joue beaucoup au brelan; mais nos chères études n'y perdent rien. Il faut allier le travail et le plaisir. » Voyez la lettre de la marquise du Châtelet à Frédéric, du 1er août 1739, t. XVII, p. 30.

b Cet auteur fou, etc. (Variante des Œuvres posthumes, t. IX, p. 67.) La traduction allemande, t. VIII, p. 284, porte : Das Volk der Thoren, etc.