<235> et manqué contre le roi de Pologne s'est passé (à la communion près) de la manière qu'il est détaillé dans les gazettes. Il est vrai que le misérable qui a voulu assassiner le roi de Pologne en avait prêté le serment à Pulawski,a maréchal de la confédération, devant le maître-autel de la Vierge, à Czenstochow. Je vous envoie des papiers publics, qui peut-être ne se répandent pas en Suisse, où vous trouverez cette scène tragique détaillée avec les circonstances exactement conformes à ce que mon ministre à Varsovie en a marqué dans sa relation. Il est vrai que mon poëme (si vous voulez l'appeler ainsi) était achevé lorsque cet attentat se commit; je ne le jugeais pas propre à entrer dans un ouvrage où règne d'un bout à l'autre un ton de plaisanterie et de gaîté; cependant je n'ai pas voulu non plus passer cette horreur sous silence, et j'en ai dit deux mots, en passant, au commencement du cinquième chant;b de sorte que cet ouvrage badin, fait uniquement pour m'amuser, n'a pas été défiguré par un morceau tragique qui aurait juré avec le reste. J'ai poussé la licence plus loin; car, quoique la guerre dure encore, j'ai fait la paix d'imagination pour finir, n'étant pas assuré de ne pas prendre la goutte lorsque ces troubles s'apaiseront. Vous verrez, par le troisième et quatrième chant que je vous envoie, qu'il n'était pas possible de mêler des faits graves avec tant de sottises. Le sublime fatigue à la longue, et les polissonneries font rire. Je pense bien comme vous que plus on avance en âge, plus il faut essayer de se dérider. Aucun sujet ne m'aurait fourni une aussi abondante matière que les Polonais; Montesquieu aurait perdu son temps à trouver chez eux les principes des républiques ou des gouvernements souverains. L'intérêt, l'orgueil, la bassesse et la pusillanimité semblent être les fruits du gouvernement anarchique. Au lieu de philosophes, vous y trouvez des esprits


a Selon les Berlinische Nachrichten von Staats- und gelehrten Sachen du 22 décembre 1772, no 153, p. 733 et 734, Pulawski était tout à fait innocent de cet attentat.

b Voyez t. XIV, p. 254.