<337>veux et à la finesse des sucs qui se distillent et se préparent pour le cerveau. Tant que cette élaboration se fait bien, la machine ne menace pas ruine.

Vous vivrez, et vous verrez la fin du procès de Morival. J'aurais sans doute dû penser plus tôt à lui, mais la multitude et la diversité des affaires m'en ont empêché. Je vous ai de l'obligation de m'en avoir fait souvenir. Peut-être ce délai de dix ans ne nuira pas à nos sollicitations; nous trouverons les esprits moins échauffés, par conséquent plus raisonnables. Peut-être alors y aura-t-il de bonnes âmes qui rougiront de cet exemple de barbarie au dix-huitième siècle, et qui tâcheront d'effacer cette flétrissure, en faisant dépersécuter le compagnon du malheureux La Barre.

Vous serez l'auteur de cette bonne action. Je m'associerai toujours de grand cœur à ceux qui me fourniront l'occasion de soutenir l'innocence, et de délivrer les opprimés. C'est un devoir de tout souverain d'en user ainsi chez lui; et, selon les cas, il peut en user quelquefois de même en d'autres pays, surtout s'il mesure ses démarches selon les règles de la prudence.

Le crime d'avoir brisé un crucifix et d'avoir chanté des chansons libertines ne perdrait pas de réputation chez des hérétiques comme nous un officier, si d'ailleurs il a du mérite. Les sentences du parlement ne pourraient lui nuire non plus, car c'est le véritable crime qui diffame, et non pas la punition, lorsqu'elle est injuste. Il faudra voir si le vieux parlement réhabilité voudra obtempérer aux insinuations de M. de Vergennes.

Ce ministre, qui a résidé longtemps en pays étranger, a entendu le cri public de l'Europe à l'occasion de ce massacre de La Barre; il en a honte, et il tâchera de réparer en cette affaire ce qui est réparable. Mais le parlement peut-être ne sera pas docile; ainsi je ne réponds encore de rien.

Prenez bien soin de votre santé pendant le froid rigoureux qui