<378>Quant à Morival d'Étallonde, je vois bien que vos bonnes intentions n'ont pas été suffisantes pour déraciner les préjugés du fanatisme des têtes de vos présidents à mortier. Il est plus difficile de faire entendre raison à un docteur en droit que de composer la Henriade. Si Morival ne veut pas faire amende honorable, le cierge au poing, il peut venir ici; je le placerai dans le génie, à votre recommandation. Il vaut mieux étudier Vauban et Coehorn que de s'avilir, surtout lorsqu'on est innocent. Il me semble que les progrès de la raison se font sentir plus rapidement en Allemagne qu'en France. La raison en est que beaucoup d'ecclésiastiques et d'évêques catholiques, en Allemagne, commencent à avoir honte de leurs superstitieux usages, au lieu qu'en France le clergé fait corps de l'État; et toute grande compagnie reste attachée aux anciens usages, quand même elle en connaît l'abus.

On n'a parlé ici que du sacre de Reims, des cérémonies bizarres qui s'y observent, et de la sainte ampoule, dont l'histoire est digne des Lapons. Un prince sage et éclairé pourrait abolir et la sainte ampoule, et le sacre même.

J'ai vu ici deux jeunes Français bien aimables; l'un est un M. de Laval-Montmorency, et l'autre un Clermont-Gallerande. Ce dernier surtout a de la vivacité d'esprit, à laquelle est jointe une conduite mesurée et sage. Au lieu d'assister au sacre, ils voyagent. Ils ont été avec moi en Prusse, d'où ils se sont rendus à Varsovie, dans le dessein d'aller à Vienne.

Le Kain est venu ici; il jouera Œdipe, Orosmanea et Mahomet. Je sais qu'il a été à Ferney; il sera obligé de me conter tout ce qu'il sait et ne sait pas de celui qui rend ce bourg si célèbre. J'ai vu jouer Aufresne l'année passée. Je vous dirai auquel des deux je donne la préférence, quand j'aurai vu jouer celui-ci.

J'ai toute la maison pleine de nièces, de neveux et de petits-


a Personnage de Zaïre.