<406> Newton, l'auteur de l'Essai sur les mœurs et l'esprit des nations, l'oracle de la tolérance, l'émule de l'Arioste, aura encore instruit sa nation dans l'art de soulager les peuples dans la perception des impôts.

Nous ne connaissons pas trop Homère; mais Virgile n'était que poëte, Racine n'écrivait pas bien en prose, Milton n'avait été que l'esclave du tyran de sa patrie; il n'y a donc que vous seul qui ayez réuni tous ces genres si différents. Vivez donc pour éclairer votre patrie dans cette nouvelle carrière; elle vous devra son goût, sa raison, et les laboureurs leur conservation. Quel bien de plus vous reste-t-il à faire, sinon de ne pas oublier le solitaire de Sans-Souci, qui vous admire trop pour que vous ne l'aimiez pas un peu. Vale.

534. AU MÊME.

Potsdam, 5 décembre 1775.

Je vous ai mille obligations de la semence que vous avez bien voulu m'envoyer. Qui aurait dit que notre correspondance roulerait sur l'art de Triptolème, et qu'il s'agirait entre nous deux qui cultiverait le mieux son champ?a C'est cependant le premier des arts, et sans lequel il n'y aurait ni marchands, ni rois, ni courtisans, ni poëtes, ni philosophes. Il n'y a de vraies richesses que celles que la terre produit. Améliorer ses terres, défricher des champs incultes, saigner des marais, c'est faire des conquêtes sur la barbarie, et procurer de la subsistance à des colons qui, se trouvant en état de se marier, travaillent gaîment à perpétuer l'espèce, et augmentent le nombre des citoyens laborieux.


a Et qu'il s'agirait de savoir qui de nous deux cultive le mieux son champ. (Variante des Œuvres posthumes, t. IX, p. 306.)