<670> héros de notre siècle, a désiré, Sire, de venir mettre sa personne même aux pieds du plus grand prince de l'Europe, d'être le spectateur des qualités sublimes de Frédéric le Grand, et de pouvoir dire : Je l'ai vu. J'ose assurer V. M. que M. de Guibert est bien digne à tous égards de lui rendre hommage, par la profonde vénération dont il est pénétré pour elle, par l'étendue et la variété de ses connaissances, par le désir qu'il a de les éclairer des lumières supérieures de V. M., enfin, par les vertus que V. M. préfère au génie même, par la candeur et l'honnêteté de son caractère, la simplicité de ses mœurs et la noblesse de son âme. Quoiqu'il fasse, comme il le doit, de l'étude de son métier sa principale et sa plus chère occupation, il a su donner aux lettres et à la philosophie, et avec le plus grand succès, tous les moments que cette étude a pu lui laisser. Il vient chercher dans votre personne le modèle et l'arbitre de tous les talents que la nature partage ordinairement entre plusieurs grands hommes; et il mérite, Sire, d'admirer également en vous le général et l'écrivain, le monarque et le philosophe. Après avoir pris V. M. pour juge de ses essais militaires, il oserait aussi, s'il ne craignait de lui dérober des instants précieux, lui soumettre ses essais dans un genre bien différent, mais où les leçons de V. M. ne lui seraient pas moins utiles. Il a fait une tragédie dont le sujet est le connétable de Bourbon, et dont il serait très-flatté que l'auteur du poëme de la Guerrea voulût bien entendre la lecture. Il n'appartient pas, Sire, à un humble et timide géomètre de prévenir le jugement que V. M. portera de cette tragédie. Mais j'avoue que je me serais bien mépris sur le plaisir qu'elle m'a fait, si les sentiments de grandeur et de vertu dont elle est remplie ne méritaient pas à M. de Guibert votre estime et vos bontés. Une des marques les plus flatteuses, Sire, que V. M. pût lui en donner, ce serait de lui permettre d'être témoin de ces manœuvres savantes qui rendent les Prussiens si célèbres et si formidables. J'ai


a Voyez t. X, p. 259-318.