<244>L'abbé Raynal souffre d'un destin à peu près semblable, à présent, dans un affreux cachot de la Bastille, après s'être trouvé, il y a à peine six mois, à côté du César Joseph, dînant à Spa en compagnie de ce monarque : j'avais cru qu'une sauvegarde contre tout opprobre était d'avoir conversé une fois dans sa vie avec un caput orbis.a Il faut donc que dans ce siècle pervers il n'y ait plus d'abris pour la médiocrité contre les caprices de la fortune. O Salomon! si lu revenais au monde, tu confesserais qu'il y a bien des nouveautés arrivées de nos jours, que tu n'avais ni vues, ni imaginées, et il s'en produira bien encore d'autres. J'abandonne, comme de raison, l'avenir aux vagues destinées; je me borne à demander uniquement à notre bonne mère nature la conservation du sage Anaxagoras, et j'abandonne à leur mauvais sort les Braschi, les Raynal, les successeurs de Chouli-Kan,b les ignatiens, les capucins et les Anglais. Sur ce, etc.

252. AU MÊME.

Le 23 mars 1782.

Non, mon cher Anaxagoras, mon zèle philosophique ne s'est point exhalé contre vous, qui êtes un vrai sage, mais contre des écervelés qui, se couvrant du titre spécieux de philosophes, s'avisent de créer un monde à leur façon au bout du dix-huitième siècle. J'avais présumé que les progrès du bon sens et des connaissances auraient au moins détrompé les scrutateurs de la nature de l'idée absurde de l'origine que des imbéciles ont donnée au monde. Mais notre auteur


a Voyez Büsching, Character Friedrichs des Zweiten, seconde édition, p. 33.

b Voyez t. II, p. 53.