<238> assez comiquement. On m'a conseillé de fumer de certaines herbes, ce qui m'a d'abord soulagée; mais comme j'ai été obligée de réitérer le même remède plusieurs fois, mes dames m'ont tenu compagnie, et nous avons toutes fumé comme des dragons. Vous voyez, mon très-cher frère, qu'avec mon courage naturel, mon génie pour la guerre et ce nouveau talent que je viens d'acquérir, je pourrais devenir grand général. Il me reste pourtant un doute, car je n'ai jamais trouvé dans l'histoire qu'Alexandre ni César aient fumé. Quoi qu'il en soit, on m'a pronostiqué que je commanderais une armée dans le cours de cette année. Je suis si fière de cette prophétie et si crédule, que je ne lis plus que des livres qui traitent du métier; et pour bien apprendre la tactique, j'arrange des pompons et des fanfreluches pour l'Opéra. Pardonnez-moi toutes ces folies; la morale et le sérieux sont des matières rebattues pour vous; il faut bien que j'en cherche qui vous soient inconnues, pour vous éviter l'ennui de mes lettres. Je suis avec tout le respect et la tendresse imaginable, mon très-cher frère, etc.

240. A LA MARGRAVE DE BAIREUTH.

Ce 28 (mars 1752).



Ma très-chère sœur,

J'ai eu le plaisir de recevoir votre lettre, où je vois que de jour en jour vous devenez plus grand capitaine. Si vous ne surpassez pas encore les Turenne et les Condé par vos grands exploits, vous les effacez de beaucoup par le caractère et les charmes d'esprit, ce qui est bien préférable à des tours de spadassin. Je reviens de Berlin, où