<276>sir que votre seule personne. Je vous prie de me faire grâce des grandes tables, des cérémonies, et de tout ce qui me distrairait de vous voir et de vous entendre. Je n'aurai que très-peu de monde avec moi, et si peu, que certainement cela ne vous causera aucun embarras. Ici, personne ne se doute de mon voyage, et je le tiendrai caché jusqu'au moment où je partirai de Halle, pour exiler tout embarras en chemin, et pour que les voisins n'aient pas le temps de faire leurs gloses. Je suis à présent dans le fort de mes occupations militaires, ce qui m'empêche de vous dire autre chose, sinon que je suis de corps et d'âme, ma très-chère sœur, etc.

275. A LA MÊME.

(Ermitage) ce 20 (juin 1754).



Ma très-chère sœur,

Je pars d'ici comblé de vos bontés; je quitte le séjour de la paix et de l'amitié pour celui du trouble et des soucis. Mes regrets ne finiraient point, si je ne croyais pouvoir vous rendre quelque service en vous envoyant notre esculape. Tous mes vœux tendront à le faire réussir dans cette cure. Ayez soin, ma chère sœur, d'une santé dont dépend le bonheur de ma vie. Vous qui connaissez si bien l'amitié, et jusqu'où va la force des sentiments, jugez de mon cœur par le vôtre, et ayez, je vous en conjure, tous les ménagements pour ce corps faible et cette santé délicate à laquelle est jointe une aussi belle âme. Je ferai vos excuses à la Reine douairière de ce que vous ne lui pouvez écrire; je ferai vos compliments à tout le monde, sachant à peu près ce que vous leur auriez fait dire, et je conserverai toute