126. A LA MÊME.

Berlin, 8 décembre 1742.



Ma très-chère sœur,

Vous badinez sur le sujet de nos divertissements; mais c'est tout ce qu'il reste à faire à des personnes désœuvrées comme nous. Pendant que les grands princes de l'Europe se font la guerre véritablement, nous la faisons sur le théâtre, et voyons galamment représenter la fureur des hommes. Nous avons vu et entendu hier l'opéra de César; le public en paraît très-content, et je suis du sentiment qu'il a raison, car je n'ai vu de ma vie un spectacle plus galant et plus magnifique. Nos voix sont fort supérieures à celles de l'année passée, et les danses sont aussi bonnes qu'il y en ait en Europe.

Je crois que vous avez des nouvelles de Prague par les Autrichiens,<129> car les miennes sont toutes différentes; il ne faut jamais croire ce que ces fanfarons disent. La guerre pourra peut-être se finir plus tôt que l'on ne pense, si la France trouve moyen de détacher la cour de Vienne de l'Angleterre. Enfin il est impossible que l'on juge à présent de ce chaos, que le temps seul doit débrouiller.

Adieu, ma très-chère sœur; je vous prie de me croire avec une parfaite tendresse, etc.