<341>J'ai lu les Lettres sur les miraclesa dont V. M. m'a fait l'honneur de me parler. Il y en a de bien raisonnées; il y en a de plaisantes; il y en a que l'auteur aurait pu retrancher. L'auguste parlement de Paris ne leur a point encore fait la grâce de les brûler suivant son usage; il a pour le présent d'autres affaires, et l'embarras où il se trouve laisse respirer un peu la philosophie, dont nos pédants en robe n'ont pas moins juré la perte que des jésuites, mais qui ne périra pas comme eux.

Continuez, Sire, à faire de votre vivant des miracles que la raison ne contredira point, et qui valent bien ceux que tant d'hommes inutiles et méprisés pendant leur vie ont prétendu faire après leur mort. Un grand roi est fait pour l'histoire, et non pour le calendrier.

Mais je m'aperçois un peu tard que j'abuse du temps et de l'indulgence de V. M. par une trop longue lettre; je termine donc celle-ci en la priant de me conserver ses bontés, et d'être bien persuadée du profond respect, de l'attachement inviolable et de l'admiration avec laquelle je serai toute ma vie, Sire, etc.


a Questions sur les miracles, par Voltaire. Voyez ses Œuvres, t. XLII, p. 143 et suivantes.