<182> dans les affaires, je crois vous devoir découvrir ma pensée sur la façon d'établir le théâtre de la guerre.

Tant que nous n'attirerons pas l'ennemi dans des plaines, nous ne devons pas nous flatter d'emporter sur lui de grands avantages; mais dès que nous pourrons le priver de ses montagnes, de ses forêts et des terrains coupés dont il tire une si grande utilité, ses troupes ne pourront plus résister aux nôtres.

Mais où trouver ces plaines? me direz-vous. Sera-ce en Moravie, en Bohême, à Görlitz, à Zittau, à Freyberg? Je vous réponds que non, mais que ces terrains se trouvent dans la Basse-Silésie, et que l'insatiable ardeur avec laquelle la cour de Vienne désire de reconquérir ce duché l'engagera tôt ou tard d'y envoyer ses troupes. C'est alors que, obligés de quitter les postes, la force de leur ordonnance et l'attirail imposant de leur canon se réduira à peu de chose. Si leur armée entre dans la plaine au commencement d'une campagne, leur témérité peut entraîner leur ruine totale, et dès lors toutes les opérations des armées prussiennes, soit en Bohême, soit en Moravie, réussiront sans peine.

C'est un expédient fâcheux, me direz-vous, que celui d'attirer un ennemi dans son pays. J'en conviens; cependant c'est l'unique, parce qu'il n'a pas plu à la nature de faire des plaines en Bohême et en Moravie, mais de les charger de bois et de montagnes. Il ne nous reste qu'à choisir ce terrain avantageux où il est, sans nous embarrasser d'autre chose.

Si les Autrichiens méritent des éloges de l'art qu'ils ont mis dans leur tactique, je ne puis que les blâmer sur la conduite qu'ils ont tenue dans les grandes parties de la guerre. Ces forces si supérieures, ces peuples qui se précipitaient sur nous des quatre coins de la terre, qu'ont-ils opéré? Est-il permis, avec tant de moyens, tant de forces, tant de bras, de faire si peu de chose? N'est-il pas clair que si, au moyen d'un concert bien arrangé, toutes ces armées avaient agi en