<48> donc, messieurs, qu'ayant parcouru les systèmes différents de fortification, et ne se sentant pas aussi avancé dans cette partie qu'il l'aurait désiré, durant six mois il prit des leçons du colonel Ricaud, sans y avoir été incité par personne, et à l'insu de ses parents mêmes. O jeune homme! quel exemple que le vôtre pour la jeunesse lâche et inappliquée qu'il faut contraindre à s'instruire! et que ne devait-on pas se promettre de vos heureuses dispositions! Voulez-vous des marques frappantes de la solidité de son esprit? Publions hardiment la vérité; osons dire devant cet auditoire illustre ce qui doit être au moins connu d'une partie de ceux qui le composent. Agé de dix-huit ans, le prince savait rendre compte des systèmes de Des Cartes, de Leibniz, de Malebranche et de Locke; non seulement sa mémoire avait retenu toutes ces matières abstraites, mais son jugement les avait toutes épurées. Il était étonné de trouver dans les recherches de ces grands hommes moins de vérités que de suppositions ingénieuses; et il était parvenu à penser, comme Aristote, que le doute est le commencement de la sagesse.

Un jugement droit, qui le conduisait dans toutes ses démarches, l'avait borné, dans l'étude de la géométrie, aux Éléments d'Euclide : il disait qu'il abandonnait la géométrie transcendante à des génies désœuvrés qui pouvaient la cultiver par luxe d'esprit. Sera-t-il croyable à la postérité que ce prince aimable, ayant à peine passé le seuil du sanctuaire des sciences, ait dû faire rougir tant de savants blanchis sous le harnois, qui, remplissant leur mémoire, n'ont jamais éclairé leur raison?

Un bon esprit apporte des dispositions à tout ce qu'il veut entreprendre : il est tel qu'un Protée, qui change sans peine de formes et paraît toujours réellement l'objet qu'il représente. Notre prince, qui était né avec ce don heureux, ne laissa point échapper la pratique de l'art militaire à la sphère de ses connaissances : il paraissait né pour tout ce qu'il faisait. Son émulation et son penchant se découvraient