<53>De ce butor de commandant
Qui la perdit naguère un an.
Les postillons pourront vous dire
Ce que j'omets ici d'écrire
Du feu, des bombes, du canon,
Des approches, sapes, tranchées,
Des palissades arrachées,
Du globe de compression,
Des assauts, des brèches jonchées
De pandours sans confession
Précipités dans l'Achéron.
Ma muse humaine et plus timide,
Ni de sang, ni de mort avide,
Abhorre ce lugubre ton.
Qu'une autre muse boursouflée
Chante l'Europe désolée,
Victime de l'ambition,
Dans les champs de la fiction
Je choisis plutôt des images
Qui plaisent aux esprits volages
Que les feux et l'explosion
Du Vésuve et de ses ravages.
Quand de Noé le beau pigeon,
Vrai messager de patriarche,
L'olive au bec, volant à l'arche,
Apportera dans ce canton
La nouvelle tant désirée
D'une paix sûre et de durée,
Alors, tout rempli d'Apollon,
Cédant à l'ardeur qui m'embrase,
Et piquant des deux mon Pégase,
Je volerai vers l'Hélicon.
Mais en passant, je vous supplie
Que ma muse fort affaiblie,
Et que le froid de l'âge atteint,
Ranime son feu presque éteint
Au brasier de votre génie.