<103>à demander à V. M. : c'est que je puisse mener madame d'Argens. Voici trois ans de suite que je fais toutes les années une maladie considérable. J'espère que cela n'arrivera pas cette année, par la diète que j'observe; mais, si V. M. n'avait pas eu la bonté de permettre que ma femme m'accompagnât à Breslau, livré aux soins de mes domestiques, je serais allé faire ma révérence au Père éternel, et je vous prie d'être bien persuadé que, sans vouloir faire le courtisan, j'aime beaucoup mieux être avec vous à Sans-Souci qu'avec lui dans son paradis. O Sans-Souci! ô Sans-Souci! Pourquoi ne puis-je pas donner mon Friesel à la R ..., ma diarrhée à la C ... et mes indigestions à L ...! Si cela pouvait avoir lieu, ces trois personnes songeraient plus à la pharmacie qu'à la guerre. J'ai l'honneur, etc.

88. AU MARQUIS D'ARGENS.a

Wilsdruf, 19 novembre 1759.

Marquis, quel changement! moi, chétif, moi, profane,
Qui fréquente peu le saint lieu,
Sans toque, sans bonnet dont la faveur émane
Du serviteur sacré de Dieu,
Siégeant au Vatican en tiare et en soutane;
Moi, dont l'attachement au culte naturel,
Respectant la pure doctrine
Empreinte dans nos cœurs par une main divine,
Ne servit ni Baal, ni le Dieu d'Israël;
Moi, dont l'adversité fut pour trois mois l'école,
Qu'à Vienne un frauduleux écrit
Annonçait vagabond, proscrit,
Que plus d'un ministre frivole,
Plus d'un maraud tondu, décoré d'une étole,
Sur les vagues récits d'un téméraire bruit,
Avait cru terrassé, détruit :
Par un coup imprévu la quinteuse Fortune,


a Voyez t. XII, p. 132-134.