<104>Après m'avoir cent fois préféré mes rivaux,
Et prêt à me noyer, par caprice ou rancune,
D'un secourable bras m'élève sur les flots;
Et cet homme bénit, ce dévot personnage,
Qui dévore son Dieu cinquante fois par an,
Et qui, pour triompher de nous et de Satan,
Va trottant en pèlerinage,
Ce héros, par brevet portant titre de sage,
Confondu, brouillé dans son plan,
Nous abandonne ce rivage;
En Bohême il s'est élancé,
En haletant, tout harassé,
Comme un dogue étranger fuit, en hurlant de rage,
Le cuisinier qui l'a fessé.
O fantasque Fortune! enfin en est-ce assez?
Comme de notre sort ta cruauté se joue!
Celui-ci sous un dais par ta main est placé,
Et celui-là du trône est jeté dans la boue.
Ce fameux Fabius que le saint-père avoue,
Par toi si longtemps caressé,
Dont l'image t'était si chère,
Éprouve, en s'étonnant, les flots de ta colère;
A cet amant heureux, qui m'avait effacé
De ta mémoire trop légère,
Aujourd'hui sans raison ta faveur me préfère.
Mais le souvenir du passé
Sur l'obscur avenir m'éclaire;
Toi-même, tu m'appris le cas
Que d'une coquette on doit faire.
Malgré tes séduisants appas,
Ni ta tendresse mensongère
Ni ton brillant éclat ne me séduiront pas.
Mais, dis-moi, par quelle sottise,
Te commettant avec l'Église,
Oses-tu prendre en main l'intérêt d'un damné,
Hérétique endiablé, digne qu'on l'exorcise,
Par les conciles condamné?
Hélas! que tu me scandalise!
Dis-moi quel pouvoir t'autorise
D'opprimer un prédestiné
Que saint Népomucène et le ciel favorise,
Et dont le front, déjà de rayons couronné,
Aux miracles prélude, étant environné