<106>Par Wenceslas fut condamné
A faire, cet hiver, un bout de pénitence,
Et la Fortune exécuta
D'un tour de main cette sentence.
Le héros troublé radota,
En soi perdant la confiance,
La Saxe prestement quitta.
Et puis, que de toute œuvre pie
Tout bon chrétien présomptueux,
Scrutant son zèle fastueux,
Des ruses de Satan et de soi se défie.

Je vous envoie des vers à la glace, faits dans des camps, au milieu de la neige. Ils ne sont bons que parce qu'ils vous annoncent une bonne fin de campagne. Nous avons si fort resserré l'ennemi, qu'il me semble impossible qu'il regagne la Bohême sans faire de grandes pertes. Dans cet embarras, Daun se trouve comme l'âne de Buridana entre deux boisseaux. Je suis presque sûr d'être le 25 à Dresde; ainsi, mon cher, préparez-vous au voyage. J'aurai soin de la voiture et des gîtes, ainsi que du logement de Dresde. Adieu, mon cher marquis; à revoir bientôt.

89. AU MÊME.

Wilsdruf, 22 novembre 1759.

Vous en userez, mon cher marquis, avec mon ouvrage comme vous le trouverez bon. Je suis si étourdi du malheur qui vient d'arriver au général Finck,b que je ne puis pas encore revenir de mon étonnement. Cela dérange toutes mes mesures, et me pénètre jusqu'au vif. L'infortune qui persécute ma vieillesse m'a suivi de la Marche en Saxe. Je lutterai contre, tant que je pourrai. Ce petit hymne que je vous ai envoyé, adressé à la Fortune, a été fait trop vite; il ne faut chanter victoire qu'après


a Voyez t. IV, p. 14, et t. VIII, p. 316.

b A Maxen, le 20 novembre 1709. Voyez, t. V, p. 32 et 33.