<129>mes livres; je dîne et me couche avec eux. Cicéron avait bien raison de dire que les lettres font l'ornement et la douceur de la vie dans tous les états et tous les âges.c C'est une ressource dont j'éprouve à présent toute la puissance; elle m'aide à supporter mon malheur présent et à me distraire des songes de l'avenir. Dites-moi, je vous prie, si vous trouvez que mes vers se ressentent de l'étude que j'ai faite de Racine. Je voudrais le savoir par curiosité, car je me le persuade peut-être sans raison. Je ne vous demande point de louanges, mais le témoignage de votre conscience. Adieu, mon cher marquis. Écrivez-moi toutes les balivernes que vous apprendrez; je suis comme Malebranche, je voudrais même que des hochets pussent m'amuser.d Soyez persuadé de l'amitié et de l'estime de votre vieil ami.

107. AU MÊME.

(Freyberg) 1er mars (1760).

Vous jugerez de ma docilité, mon cher marquis, par les corrections ci-jointes.a Au lieu de Messieurs les beaux esprits, que vous n'aimez pas, mettez :

Aux flammes tous les beaux esprits.

Ensuite, après

Ont, sur Fart de penser, à leurs arrêts soumis,

ajoutez :

Exercé autant de ravage
Que leurs cruels aïeux ont signalé leur rage
Au jour de Saint-Barthélemy.

Voilà ce que j'ai pu faire pour votre service. Cette Saint-Barthélemy est si longue, qu'on ne sait comment la faire entrer


c Voyez t. XVII, p. 308.

d Voyez t. XIII, p. 96.

a Ces corrections se rapportent au commencement de l'Épître à d'Alembert. Voyez t. XII, p. 147.