<95>Par la manière dont vous vous exprimez, vous montrez qu'il n'a rien perdu ni de sa force, ni de son agrément. Si vous voulez être cru, il faut vous résoudre à ne pas parler et à ne point écrire.

Je reçois votre lettre samedi au soir; je ne pourrai avoir que lundi matin, chez Néaulme, les Révolutions romaines et celles de Suède; je les ferai partir sans faute.

Il me tarde bien que la campagne soit finie, pour avoir le bonheur d'aller me mettre à vos pieds. Je suis inconsolable que vous n'ayez pas voulu que j'allasse à Fiirstenwalde.

J'espère que cet hiver nous donnera la paix. Les Français viennent encore d'être totalement battus dans les Indes orientales; ils ont été obligés d'abandonner le fort David. On leur a pris leurs établissements les plus considérables, et les affaires sont aussi délabrées dans les Indes orientales que dans les occidentales. Ces nouvelles sont certaines, car elles ont été apportées par trois vaisseaux arrivés successivement à Londres. Si les Anglais veulent, la paix est assurée. V. M. dira que les Français peuvent se retirer de l'alliance sans que les autres puissances cessent la guerre. Mais qui payera les barbares? qui donnera des subsides aux ennemis de Stralsund? La maison d'Autriche a-t-elle jamais fait la guerre sans l'argent des Hollandais et des Anglais? Et si elle veut continuer la guerre, l'armée du prince Ferdinand peut pénétrer jusqu'aux portes de Vienne, n'ayant plus affaire aux Français. Quel plaisir alors pour le roi d'Angleterre de mortifier une reine qui, oubliant toutes les obligations qu'elle lui avait, a voulu favoriser une armée qui voulait faire un véritable désert de son électorat, et occasionner une descente en Angleterre, qui le renversait du trône, lui et sa maison! Des attentats de cette nature ne s'oublient jamais, quelques démarches que la politique puisse faire. J'ai toujours pris la liberté de dire à V. M. que, si les Français quittaient cette alliance, qu'ils regretteront pendant trente ans d'avoir contractée, tout le reste de la ligue tomberait bientôt.

V. M. aura pu voir, par la première lettre que j'eus l'honneur de lui écrire au sujet de madame Tagliazucchi, que je regardais cette femme comme une folle et un assez mauvais sujet; mais