<70>blocus de Neisse. Dans ce temps même, on entendit escarmoucher devant la ville; tout le monde crut que l'avant-garde de M. de Neipperg était sur le point d'investir Jägerndorf. Il n'y avait que cinq bataillons dans cette malheureuse ville, cinq pièces de trois livres, et assez de poudre pour quarante charges. La situation aurait été désespérée, si M. de Neipperg avait su en profiter; mais la montagne n'enfanta qu'une souris. Les ennemis voulaient savoir si les Prussiens étaient encore dans leur quartier; pour s'en instruire, leurs troupes légères allaient escarmoucher devant chaque ville, afin de rapporter à leurs officiers ce qui en était.

Les desseins des ennemis s'étant tout manifestés, le Roi ne balança plus un moment pour rassembler l'armée. Les troupes de la Basse-Silésie eurent ordre de passer la Neisse à Sorge, et celles de la Haute-Silésie, de joindre le Roi à Jägerndorf. Le 4 d'avril, le Roi partit pour Neustadt avec tous ces corps rassemblés, en côtoyant l'armée ennemie, qui marchait par Zuckmantel et Ziegenhals vers Neisse. Le lendemain,22 il se porta sur Steinau, éloigné d'un mille de Sorge, où il avait fait construire des ponts sur la rivière de Neisse. Il fallut lever le blocus de Brieg, et le général Kleist reçut ordre de joindre l'armée avec son détachement; le duc de Holstein reçut des ordres pareils, réitérés à plusieurs reprises : ceux qui en étaient chargés ne purent les lui rendre; et il demeura tranquillement à Frankenstein, voyant passer l'ennemi à sa droite et à sa gauche sans s'en embarrasser. Des déserteurs de l'armée autrichienne arrivèrent à Steinau; ils déposèrent que le général Lentulus avait joint le même jour le maréchal Neipperg auprès de Neisse. Sur cette nouvelle, les quartiers prussiens furent resserrés à l'instant à l'entour de Steinau, et le Roi choisit un poste où il pût recevoir l'ennemi, au cas qu'il voulût se porter sur les Prussiens. Pour comble d'embarras, le feu prit sur le soir au quartier de Steinau; ce ne fut que par bonheur qu'on sauva le canon et les munitions de guerre par des rues étroites dont toutes les maisons étaient enflammées; les troupes passèrent la nuit au bivouac, sur le terrain que le Roi avait choisi pour son camp.


22 5 avril.