<5>Il ne faut point publier les faveurs des dames, ni celles des Muses, si tant est qu'on en reçoive; la discrétion est le seul moyen de conserver ces connaissances.

Laissez dans l'oubli confondus
Mon nom et mes vers inconnus.
Heureux qui ne fait de sa vie
Compassion ni jalousie!

Il n'en est pas de même de vos vers.

Par vos immortelles chansons,
Les matières les plus pesantes
Deviennent légères, brillantes,
Comme ces coloris profonds
Que le soleil, par ses rayons,
Rend égaux aux couleurs les plus resplendissantes.

Ce n'est pas tout : la grande science du poëte est de marier si parfaitement les saillies de son imagination avec les préceptes de son art, que cela fasse un ensemble d'une vivacité sans écarts et de règles pratiquées sans pédanterie.

Chez vous la nature ingénue
Se réunit aux lois des arts.
L'une, sans gêne, est toujours nue;
L'autre, observant certains égards
Et n'évitant que les écarts,
Pour règle sait plaire à la vue.
Ainsi les pilotes prudents
Dirigent les enfants d'Éole
Sans l'aiguille de leur boussole,
Et savent gouverner et profiter des vents.

Vous me croyez peut-être désœuvré, en recevant une si longue lettre et tant de mauvais vers à la fois; il n'en est pourtant pas tout à fait ainsi.

Malheur à tous les rois qui ne sont plus que rois,
Absorbés dans leur greffe, imbus de leurs exploits,
Qui, tristement perchés sur le sommet du trône,
Ou dévorent la messe, ou s'endorment au prône,
Et qui de l'étiquette ont conçu la fureur,
Esclaves enchaînés aux bords de leur grandeur!
Il faut savoir descendre et monter au théâtre,