<11>Je me berce des plus flatteuses espérances sur la vision béatifique de Clèves. Si le roi de France envoie complimenter V. M. par qui je le désire, je vous fais ma cour; sinon, je vous fais encore ma cour. V. M. ne souffrira-t-elle pas qu'on vienne lui rendre hommage en son privé nom, sans y venir en cérémonie? De manière ou d'autre, Siméon verra son salut.a

L'ouvrage de Marc-Aurèle est bientôt tout imprimé. J'en ai parlé à V. M. dans cinq lettres; je l'ai envoyé, selon la permission expresse de V. M., et voilà M. de Camas qui me dit qu'il y a un ou deux endroits qui déplairaient à certaines puissances. Mais moi, j'ai pris la liberté d'adoucir ces deux endroits, et j'oserais bien répondre que le livre fera autant d'honneur à son auteur, quel qu'il soit, qu'il sera utile au genre humain. Cependant, s'il avait pris un remords à V. M., il faudrait qu'elle eût la bonté de se hâter de me donner ses ordres, car, dans un pays comme la Hollande, on ne peut arrêter l'empressement avide d'un libraire qui sent qu'il a sa fortune sous la presse.

Si vous saviez, Sire, combien votre ouvrage est au-dessus de celui de Machiavel, même par le style, vous n'auriez pas la cruauté de le supprimer. J'aurais bien des choses à dire à V. M. sur une académie qui fleurira bientôt sous ses auspices; me permettra-t-elle d'oser lui présenter mes idées, et de les soumettre à ses lumières?

Je suis toujours avec le plus respectueux et le plus tendre dévouement, etc.

130. A VOLTAIRE.

Charlottenbourg, 27 juin 1740.

Mon cher Voltaire, vos lettres me font toujours un plaisir infini, non pas par les louanges que vous me donnez, mais par la prose instructive et les vers charmants qu'elles contiennent. Vous vou-


a Voyez t. XIX, p. 180, et t. XXI, p. 47, 111 et 253.